Société
Un groupe d' «experts internationaux» pour enquêter sur les graves violences dans le Kasaï en RDC plutôt qu'une commission d'enquête indépendante. Voilà le compromis sur lequel les 47 pays membres du Conseil des droits de l'homme de l'Onu se sont mis d'accord vendredi 23 juin. Un compromis qui laisse pas mal d'incertitudes sur le pouvoir qu’auront ces experts de l'Onu pour mener une véritable enquête dans la région des Kasaï, au centre du pays.
Première interrogation : à quel point ces experts vont-ils pouvoir enquêter de façon indépendante des autorités congolaises ?
Pour Kinshasa, leur mandat se limite à un appui technique aux enquêtes congolaises déjà en cours. Faux, répond le Haut-commissaire aux droits de l’homme de l’Onu qui assure que ses experts opéreront « en totale indépendance ». Mais cette exigence ne figure pas « écrite » dans la résolution qui s’intitule bien « assistance technique à la RDC »…
Autre question celle des ressources financières pour mener à bien cette enquête à grande échelle : 42 fosses communes, 3200 civils tués et plus d’1 million de déplacés… De quels fonds et de combien d’experts le Haut-commissaire aux droits de l’homme de l’Onu va-t-il disposer ? La résolution ne répond pas à cette question.
Enfin il y a aussi la question cruciale de l’accès aux sites où des crimes ont été commis dans les Kasaï. C’est la principale difficulté de l’Onu à ce jour. Depuis des mois ses employés font face à des entraves quasi quotidiennes qui les empêchent de mener des enquêtes approfondies dans cette région.
Hier, vendredi 23 juin, les autorités congolaises se sont engagées à accueillir ces experts sur son territoire et les laisser travailler. A condition de garder la direction des enquêtes. Or c’est tout le problème : les autorités congolaises étant elles-mêmes accusées d’usage excessif de la force, toute participation de leur part à une enquête internationale risque fort d’entamer sa crédibilité.
Les regrets des Etats-Unis et de HRW
Pour les Etats-Unis le compromis trouvé est bien plus faible que la commission d'enquête indépendante voulue au départ, comme l'explique à RFI Jason Mack, représentant des Etats-Unis auprès du Conseil des droits de l'homme.
« Vu la détérioriation continue de la situation des droits de l'homme dans les Kasaï, les Etats-Unis espéraient que la résolution d'aujourd'hui serait plus forte. Les Etats Unis soutiennent la décision de déployer des experts internationaux indépendants pour enquêter sur les violations des droits de l'homme et de la loi humanitaire internationale dans la région des Kasaï.
Le mandat accordé par cette résolution inclut d'enquêter sur des attaques présumées contre des civils, dont des femmes et des enfants, par les forces armées congolaises ET des milices. Enquêter aussi sur des exécutions extra-judiciaires, des actes de tortures et de violences sexuelles par les forces armées congolaises, le recrutement d'enfants soldats par des groupes de miliciens et les rapports sur les 42 fosses communes dans le Kasaï.
Nous attendons du gouvernement congolais qu'il coopère pleinement avec cette équipe d'experts et leur donne accès à l'ensemble de son territoire ».
Le langage n’est pas « si fort et si clair » que nous l’aurions souhaité, reconnaît Ida Sawyer de l'association Human Rights Watch, mais c’est un « bon début » et il faut maintenir la « pression sur les autorités congolaises pour qu’elles acceptent de laisser cette enquête faire le travail d’une manière indépendante ».
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