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Stanislav Petrov, lieutenant-colonel de l'armée soviétique, s'est fié à son instinct pour éviter le déclenchement en 1983 d'une guerre nucléaire entre l'URSS et les Etats-Unis. Son inaction a sans doute sauvé le monde. Sa mort en mai dernier n'a été révélée que le 18 septembre.
Il est considéré comme "l'homme qui a sauvé le monde". Un titre "honorifique" mérité pour Stanislav Petrov, haut-gradé de l'armée soviétique, dont le pressentiment et l'intime conviction ont évité au monde l'une des plus grandes guerres nucléaires du XXe siècle.
Cet anonyme, héros malgré lui, est décédé le 19 mai dernier à son domicile dans un village près de Moscou qu'il payait avec sa modeste pension de militaire. Un décès rendu public quelques mois plus tard, le 18 septembre, par le réalisateur allemand Karl Schumacher, le premier à avoir rendu célèbre une histoire hors du commun.
"Lancement"
Le 26 septembre 1983, le lieutenant-colonel des forces aériennes soviétiques, Stanislav Petrov, 44 ans, "supplie le ciel d'avoir raison". Comme sa mission l'exige, il est en poste à "Serpukhov-15", un bunker secret installé près de Moscou. Comme tous les jours, il lui revient d'analyser et évaluer les données d'Oko, un système d'alerte satellite, et de prévenir immédiatement sa hiérarchie en cas de mouvements suspects.
Peu après minuit, l'alarme retentit. L'un des satellites indique avoir détecté cinq missiles balistiques américains lancés en direction de l'URSS. Les informations recueillies par le lieutenant-colonel laissent peu de place au doute : le mot "Lancement" clignote en toute lettre sur l'écran rouge d'alerte.
"Une drôle de sensation dans le ventre"
© AP.
Cet incident survient trois semaines après qu'un avion sud-coréen a été abattu par les Russes pour avoir survolé l'espace aérien soviétique. Un incident qui avait provoqué une démonstration de force de l'OTAN, renforçant l'angoisse d'une guerre nucléaire imminente.
En dépit de ce contexte et de l'alerte, Petrov a un pressentiment, "une drôle de sensation dans le ventre", comme il le dira plus tard au Washington Post. "Je ne pouvais pas bouger. Si j'avais envoyé mon rapport à mes supérieurs, personne ne l'aurait remis en question", décrira-t-il à la BBC. Ce qui aurait sans doute signifié une riposte russe et le début d'une guerre nucléaire.
Avec sang-froid, Petrov fait une déduction simple. Le système d'alarme dit ne détecter que cinq missiles, un nombre insuffisant si les Etats-Unis avaient réellement décidé de déclencher une attaque. De son côté, le radar au sol anti-missile renvoie des informations contraires et Petrov se méfie de la précision d'Oko.
"Un tel soulagement"
Stanislav Petrov dans son uniforme de l'Armée Rouge. (© Juliet Butler/Alamy)
Seul dans son bunker, il est confronté à un choix crucial. Pour lui. Et pour le monde. Suivre le protocole ou se fier à son instinct. Il opte pour la seconde option, "suppliant le ciel d'avoir raison". Une vingtaine d'interminables minutes plus tard, il ne s'est toujours rien passé. "S'il y avait eu une vraie explosion, je l'aurais déjà su", pense-t-il à cet instant. "C'était un tel soulagement". L'angoisse passée, il prévient sa hiérarchie qu'il s'agit d'une fausse alerte.
L'enquête menée par les autorités russes révélera plus tard que les satellites avaient confondu les reflets du soleil sur les nuages avec des missiles balistiques. "C'était mon travail, mais ils ont eu de la chance que je sois aux manettes ce soir-là", exprimera-t-il dans Wired alors que ses collègues et lui avaient été formés à transmettre la moindre information coûte que coûte.
Son histoire n'a été révélée que quinze ans plus tard dans les mémoires de Gen Youri Votintsev, un ancien commandant soviétique du département de défense anti-missile. Pour son geste ou plutôt son inaction héroïque, Petrov Stanislav reçut, en 2006, la distinction (unique) de "l'Homme qui a évité une guerre nucléaire" de la part de l'Association of World Citizen, une organisation qui milite en faveur de la paix dans le monde. Un minimum au regard de son action héroïque.
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