Monde
Le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki a indiqué, lundi 23 janvier, que son pays allait demander l'accord de Berlin pour livrer à l'Ukraine des chars d'assaut Léopard, de fabrication allemande. L'Allemagne ne « s'opposera pas » à la volonté de la Pologne de livrer des chars Leopard à l'Ukraine, qui les réclame avec insistance, avait déclaré, dimanche 22 janvier, la cheffe de la diplomatie allemande, Annalena Baerbock sur la chaîne de télévision française LCI. Elle met ainsi la pression sur le chancelier Scholz, qui s'est montré, lui, plus réservé sur le sujet.
« Nous allons demander un tel accord mais c'est une question secondaire », a déclaré aux journalistes M. Morawiecki. « Même si nous n'obtenons pas leur accord, nous donnerons nos chars à l'Ukraine », a-t-il ajouté, rappelant que son pays cherchait à créer une « coalition » de pays prêts à livrer des chars aux Ukrainiens.
L'Allemagne est prête à autoriser la Pologne à livrer des chars Leopard à l'Ukraine, qui les réclame avec insistance, a affirmé dimanche la cheffe de la diplomatie allemande, Annalena Baerbock, renforçant la pression sur le chancelier Olaf Scholz, toujours réticent à se prononcer sur la question.
« Si on nous posait la question, nous ne nous opposerions pas » à la livraison à Kiev de ces chars de fabrication allemande, a déclaré la ministre écologiste, qui gouverne en coalition avec les sociaux-démocrates d'Olaf Scholz et les libéraux, lors d'une interview à Paris sur la chaîne française LCI.
La décision finale appartient néanmoins au chancelier Olaf Scholz, qui a jusqu'à présent refusé de se prononcer sur la question de ces livraisons indirectes, tout comme sur celle de fournir directement des Léopard issus des stocks allemands. Le chancelier, hier à Paris, a été plus vague, assurant cependant que « l'Ukraine doit savoir que nous allons continuer de l'aider », et mettant l'accent sur la coopération internationale.
« La décision [...] dépend de beaucoup de facteurs et est prise à la chancellerie », a souligné de son côté le nouveau ministre allemand de la Défense, Boris Pistorius, dans un entretien à la télévision allemande ARD, diffusé peu de temps après l'interview de la cheffe de la diplomatie. M.Pistorius, social-démocrate comme le chancelier Scholz, n'y était toutefois pas interrogé sur les déclarations de Mme Baerbock.
Un affront ?
Qu'Annalena Baerbock ait choisi un media français pour inciter la Pologne à forcer les réticences d'Olaf Scholz sur la question des chars d'assaut Leopard est perçu à Berlin comme un véritable affront, rapporte notre correspondante à Berlin, Nathalie Versieux. La ministre déborde ainsi de son cadre formel - les affaires étrangères- et fait monter la pression sur le chancelier.
De fait, la démarche d'Annalena Baerbock est tout à fait inhabituelle, même si sur le fond, ses propos ne sont pas vraiment nouveaux. S'est-elle fait taper sur les doigts ? Ce lundi matin à Bruxelles, Baerbock était beaucoup plus évasive sur la question des Leopard.
Pressions de la Pologne et des pays baltes
Dimanche, le Premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, était une nouvelle fois monté au créneau, qualifiant d' « inacceptable » le refus de Berlin de fournir des chars lourds Leopard à Kiev. La Pologne et la Finlande ont proposé de livrer des Leopard qu'elles possèdent, mais elles ont besoin de l'agrément officiel de Berlin en vue d'une réexportation. Les ministres des Affaires étrangères des trois pays baltes avaient appelé la veille, samedi, l'Allemagne à livrer « dès maintenant » des chars Leopard à l'Ukraine afin de l'aider à arrêter l'agression russe.
La crainte d'une escalade militaire avec Moscou et les réticences de Berlin à assumer un leadership dans le camp occidental conduisent, selon des analystes, l'Allemagne à hésiter sur l'envoi de ces armes réclamées par Kiev.
Tensions au sein de la coalition au pouvoir en Allemagne
« J'ai bien compris à quel point ces chars sont importants, nous en sommes pleinement conscients », a ajouté sur LCI Mme Baerbock qui s'était récemment rendue à Kharkiv, dans le nord-est de l'Ukraine. Ce n'est pas la première fois que les ministres Verts du gouvernement, en particulier Mme Baerbock, affichent une ligne plus volontariste que le chancelier sur le sujet du soutien militaire à l'Ukraine. La quadragénaire appartient au camp des Grünen « réalos », pragmatiques, qui n'hésitaient pas à soutenir une hausse du budget de l'armée ou les centrales à charbon. Une ligne à laquelle appartenait déjà Joshka Fischer, le premier ministre des Affaires étrangères écologiste, qui avait envoyé l'Allemagne refaire la guerre, au Kosovo.
Chez les libéraux, autre partenaire de la coalition allemande, les dents grincent également. Il aurait été « au moins juste de donner le feu vert aux partenaires » pour des livraisons de Leopard provenant de leurs stocks, a déploré la libérale Marie-Agnes Strack-Zimmermann à propos des discussions de Ramstein.
Et dans l'opposition, les conservateurs regrettent les atermoiements du chancelier. Selon le vice-président du groupe parlementaire CDU/CSU, Johann Wadephul (CDU), « l'industrie allemande peut livrer presque immédiatement près de 200 chars de type Leopard 1 ».
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