Société
Le procès dit «des 100 jours» en République démocratique du Congo (RDC) pourrait finalement durer bien plus longtemps que son nom ne l’indique. Condamnés en première instance à 20 ans de travaux forcés pour «blanchiment de capitaux », «corruption» et «détournement de deniers publics», l’ex-directeur de cabinet présidentiel Vital Kamerhe et l’homme d’affaire Samih Jammal attendent toujours l’aboutissement de leur procédure en appel.
Mais s’il avait fallu à peine un mois à la justice congolaise pour les condamner en première instance – une célérité défiant toute concurrence dans une telle affaire –, on ne peut pas en dire autant de la deuxième partie du procès. Censée débuter le 21 août 2020, la procédure en appel a depuis été reportée à plusieurs reprises pour des raisons inconnues, suscitant l’incompréhension des accusés, de leurs avocats, et plus généralement celle de la population. Des rumeurs circulent en effet depuis plusieurs semaines sur les réseaux sociaux quant à la lenteur de la procédure, interrogeant notamment les motivations de ces reports à répétition.
Après avoir reconnu l’existence de conteneurs bloqués dans des ports d’Angola et de Tanzanie, le gouvernement annonçait fin octobre mettre en route une commission d’enquête chargée de vérifier l’avancée réelle du chantier. Le procès semblait alors prendre un nouveau départ : très peu a pourtant été fait depuis. A quoi joue donc le gouvernement, et à qui profite une telle lenteur dans la conduite de cette enquête ? Certainement pas à Samih Jammal, 82 ans, dont la santé dégradante et les conditions rudes de détention n’ont fait qu’aggraver son état déjà fragile. Il a d’ailleurs tout intérêt à ce que la procédure aille au bout, maintenant que ses avocats affirment avoir pu rassembler des preuves suffisantes de l’avancée du chantier et de la bonne foi de leur client.
L’existence de maisons préfabriquées dans plusieurs ports africains avait d’ailleurs été avancée à de multiples reprises par la défense en première instance, sans être prise en compte par les juges faute de preuve. En réalité, c’est davantage du côté du gouvernement que semblent provenir les blocages et réticences à une poursuite du procès. Pour le Président Tshisekedi et ses proches, le procès des 100 jours constituait une opportunité en or pour témoigner de son engagement contre la corruption, tout en éliminant Vital Kamerhe qui devenait gênant en vue des présidentielles de 2023.
Mais cette stratégie pourrait finalement s’avérer contre-productive si l’innocence des deux hommes devait se confirmer dans les prochaines semaines. La situation est donc embarrassante pour le gouvernement, et cela pourrait expliquer son manque de volonté à mener le procès à son terme. Reste que la procédure en appel ne pourra être reportée indéfiniment : la vérité éclatera forcément tôt ou tard… Ne vaudrait-il pas mieux en finir au plus vite ?
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