Santé
Il est utile de rappeler, avant toute chose, que la gratuité des accouchements est une recommandation de l’OMS. Et cela concerne également, la gratuité des soins pré et postnatales, dont le but est que l’accouchement soit une expérience positive.
L’initiative est louable pour la RDC car elle permettrait, a promotion de la santé maternelle, l’équité, par l’accessibilité aux soins de certaines catégories sociales, et la réduction du taux de mortalité maternel et des nouveaux nés.
C’est aussi une stratégie de réduction potentielle de la pauvreté et des accouchements à risque. Elle permettrait également d’éliminer les dépenses catastrophiques supportées par les ménages du fait de l’utilisation de services de santé. Ce qui est l’essence même de la couverture santé universelle (CSU).
Cependant, la communication gouvernementale, nous laisse perplexe. On a l’impression d’être plus dans la promotion de la maternité que dans un processus d’une vision holistique de la CSU. D’ailleurs, Le chronogramme et les étapes d’implémentation restent flous.
Une telle situation est susceptible d’influencer finalement l’idée que les populations se font du programme de gratuité dans sa réalité et de rendre son application confuse. Au Mali par exemple, l’expérience de la gratuité a montré que les populations assimilaient la politique d’exemption des soins aux promesses antérieures et non tenues de l’État. De ce point de vue, les usagers concernés par les exemptions étaient réticents et difficilement convaincus de la gratuité des soins programmée tant qu’ils n’en avaient pas encore faits eux-mêmes l’expérience. Ce qui a contribué à expliquer le faible recours aux soins de certaines populations malgré leur exposition à la gratuité.1
Cette politique de gratuité peut générer également un effet inverse, c'est-à-dire le paiement de certains services complémentaires et indirects. Une situation, souvent créée par les prestataires des soins afin de récupérer les gains perdus s’ils ne sont pas très bien payés.
Comment peut-on lancer une politique de telle envergure sans pourtant répondre à la question des nombres lits par habitants, à la question des paiements de salaires des personnels soignants dont la problématique des grèves à répétition n’est que la pointe de l’iceberg.
Au lendemain de son Lancement, le ministre de la Santé, a tenu à rencontrer le chef du gouvernement afin d’avoir les garanties sur la budgétisation de ce programme. Et quelques semaines plus tard, il a participé à une réunion budgétaire afin de décliner les priorités du ministère de la Santé, en faisant mention du programme de gratuité des accouchements. Ce qui dénote un procédé de bonnes intentions, mais ouvre la porte à de vives critiques, car dans sa démarche, la charrue est mise avant les bœufs.
Le vœu du chef de l’État exprimé lors du discours de 30 juin 2022, n’est qu’une volonté politique dont la matérialisation sur une population de plus 100 millions d’habitants ne peut se faire à la va-vite de peur de tomber dans du populisme.
Cette politique reste discutable en RDC, au regard de ces éléments factuels et d’expériences partagées d’autres pays d’Afrique subsahariens. Il est vrai que chaque pays a son histoire et ses propres réalités, mais les expériences des autres servent à éviter les erreurs communes et à anticiper certaines difficultés.
Au Sénégal par exemple, la même politique avait été lancée, il y a plus de dix ans. Les résultats confirment plusieurs insuffisances du côté de l’offre des services de santé. La couverture sanitaire déficitaire du Sénégal ne s’est pas significativement améliorée avant et pendant la phase pilote du programme de gratuité, car sous la période 2000-2007, le Sénégal enregistrait encore un taux de couverture sanitaire de 0,4 professionnel de santé (médecins, infirmiers, sages-femmes) pour 1000 habitants contre la norme de 2,3 professionnels de santé pour 1000 habitants.2
Le lancement de cette gratuité pour les accouchements en RDC, sans répondre aux questions relatives du nombre des lits d’hospitalisation, des médecins par habitant et sans résoudre la problématique des grèves du corps médical, serait la chronique d’un échec annoncé. Et cela risquerait même de détruire le rêve de l’implémentation de la couverture sanitaire universelle dans sa vision holistique.
Patrick Ndjadi Ombombo est un Expert en couverture soins de santé et un Défenseur du droit à la santé
patrickndjadi@cramurdc.org
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