Politique
L’opposition doit se choisir en principe son porte-parole d’ici le 12 juillet 2024 comme l’exige la Constitution (30 jours après l’investiture du gouvernement). Seulement, la question crée le schisme. Elle suscite surtout le rejet de l’ECiDé et tous ses proxies. À Ensemble, on voit les choses autrement. Le parti de Moïse Katumbi reste dans sa logique, celle d’une opposition républicaine. À l’opposé du radicalisme de la bande à Fayulu, les élus de la plus grande formation politique de l’opposition seraient favorables à cette idée, quitte à mettre Tshisekedi devant ses propres responsabilités.
Sans surprise. Martin Fayulu a réservé une fin de non recevoir. Dans sa réponse, Devos Kitoko, le numéro 2 du parti phare de la coalition Lamuka, rappelle qu’il est hors de question d’institutionnaliser le porte-parolat de l’opposition. En son temps, l’ECiDé avait dénoncé, je cite, le simulacre d’élections de décembre 2023, rejeté les résultats et décidé de ne pas reconnaître les institutions qui en ont découlé.
À haute voix, le double candidat malheureux juge la démarche de Moïse Katumbi « inopportune » et pointe « un changement d’approche » du camp Katumbi, qui souhaite s’organiser comme une opposition politique. « Nous maintenons qu’il n’existe pas en RDC une majorité et une opposition légitimes issues des élections crédibles, impartiales et apaisées », cogne le camp Fayulu qui propose encore « un mécanisme consensuel de correction de l’imposture » de décembre 2023.
Dissensions profondes
Deux logiques s’affrontent présentement. Les pro et anti-porte-parolat. Il paraît logique que Fayulu qui n’avait pas aligné aucun candidat aux législatives ne mord pas à cette initiative, indique le professeur Katenga. Le poste de porte-parole revient à la formation qui a eu le plus de sièges à l’Assemblée nationale. “Le principe est démocratique”, ajoute-t-il. D’autre part, Ensemble qui participe à travers ses élus aux institutions, pousse sa logique jusqu’au bout. S’il est déjà représenté au bureau de l’Assemblée nationale et bientôt au Sénat, il serait insensé de ne pas revendiquer aussi le porte-parolat de l’opposition pour bien structurer son combat dans un cadre purement institutionnel. Normal aussi qu’il s’active, ajoute le politologue Sefu, pour faire aboutir le choix de l’option levée par sa direction politique. Si son secrétaire général, Bolengetenge a crû bon associer les autres forces, analyse-t-il, l’initiative s’inscrit dans ce sens-là. Malheureusement, sa proposition d’un règlement intérieur concerté devant conduire à la mise en place du porte-parole n’est pas vu d’un bon œil par les autres.
Démarche infondée
Devos Kitoko, à l’instar d’autres ténors Lamuka, ne comprend pas comment des élections chaotiques peuvent naître un porte-parole de l’opposition. Au temps mieux zapper l’offre que de donner à Tshisekedi le privilège de porter un discours à l’international où il se vanterait d’avoir une opposition institutionnelle. Ce qui serait, hurle un autre ténor Lamuka, une façon de légitimer des élections bâclées qui l’ont porté par tricherie au pouvoir. “Si Ensemble a rejeté les résultats, Ensemble ne doit pas accepter ce poste où Tshisekedi n’est pas prêt à franchir le pas”, assène Epenge.
Dans cette situation, le pouvoir ne peut que se flatter de voir l’opposition s’antagoniser. Avant les élections en novembre 2023, les opposants à Félix Tshisekedi s’étaient déchirés, incapables jusqu’au début de la campagne électorale de se trouver un candidat commun. Malgré la pression de la population les sommant d’acter leur volonté de phosphorer un programme commun, chacun avait préféré voler de ses propres ailes car les dissensions étaient profondes. À Jeune Afrique, Ithiel Batumike nomme la vraie cause. L’égoïsme et le manque des stratégies des leaders. Le chercheur principal en politique à l’institut congolais de recherche Ebuteli rappelle que « lors de la campagne électorale, ils se sont parfois rentrés dedans en se discréditant mutuellement avec les mêmes arguments que le candidat du pouvoir censé être leur adversaire commun ».
Les égos dans les négos n’ont pas permis au peuple d’espérer à une alternance. Aujourd’hui, la même problématique revient. Les tiraillements risquent de les séparer davantage. Difficile, dit-il, dans ces conditions, de voir l’opposition inverser la tendance actuelle.
Moïse Katumbi, futur porte-parole de l’opposition ?
Statistiquement, c’est Moïse Katumbi qui s’impose aujourd’hui comme le premier challenger de Félix Tshisekedi. Son parti occupe le poste de rapporteur adjoint au bureau de l’Assemblée nationale – le seul qui soit confié à l’opposition. Il est également le plus légitime pour le poste de porte-parole de l’opposition. « Et si Moïse Katumbi n’est pas porte-parole de l’opposition, c’est lui qui le désignera », a déjà prévenu, sur les ondes de Top Congo, Christian Mwando Nsimba, président du groupe parlementaire d’Ensemble pour la République à l’Assemblée nationale.
Mais Félix Tshisekedi compte-t-il s’en mêler ? Lors de son discours d’investiture prononcé le 20 janvier, le chef de l’État congolais a salué ses adversaires. « Vous avez, a-t-il dit, votre place dans la gouvernance de notre pays. En tant que garant de la cohésion nationale, j’y veillerai, au même titre que j’exhorterai le Parlement à assurer l’effectivité du rôle de porte-parole de l’opposition que cette dernière voudra bien désigner conformément à la Constitution ».
Selon la loi fondamentale congolaise, le porte-parole de l’opposition est choisi dans les trente jours qui suivent l’investiture du gouvernement (Judith Suminwa Tuluka a été nommée à la primature le 1ᵉʳ avril, la composition de son gouvernement annoncée le 28 mai, puis finalement investie par l’Assemblée nationale le mercredi 12 juin 2024). Il a rang de ministre d’État et jouit des avantages et des immunités y afférents. Il est désigné par consensus ou, à défaut, à l’issue d’un vote des députés nationaux ou des sénateurs membres de l’opposition politique dans le mois qui suit l’investiture du gouvernement, précise la loi du 4 décembre 2007 sur le statut de l’opposition politique.
À la présidentielle, Katumbi avait obtenu 18,08 % des suffrages. Aux législatives, Ensemble, son parti s’est contenté de 24 sièges (18 députés pour son parti Ensemble pour la République et six pour son autre regroupement Avançons-MS). Deuxième de rang, Martin Fayulu a eu de moins de 5 % à la présidentielle, Adolphe Muzito, troisième, avec 1,13 %, et seulement trois sièges pour son parti Nouvel Élan et Constant Mutamba (il a obtenu moins de 1 % à la présidentielle et vient d’être nommé ministre de la Justice). Quant à Matata Ponyo Mapon, qui s’était désisté en faveur de Moïse Katumbi, il est le seul élu de son parti, Leadership et gouvernance pour le développement (LGD). Le tableau départage les ténors de l’opposition, situe le vrai poids politique de chacun et va surtout limiter les ambitions démesurées des uns et des autres.
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atumbi et Fayulu me s’accordent pas sur le porte-parolat de l’opposition @Photo Droits tiers.