Afrique
Le dirigeant islamiste soudanais Hassan al Tourabi, chef de file du Parti populaire du congrès (PCP, opposition), est mort samedi à l'âge de 84 ans. Figure de la classe politique soudanaise, le dirigeant islamiste Hassan al Tourabi, chef de file du Parti populaire du congrès (PCP, opposition), est mort samedi à l'âge de 84 ans des suites d'une crise cardiaque, a-t-on appris de sources médicales.
Ami puis ennemi du président Bechir
Le dirigeant islamiste soudanais Hassan al Tourabi, décédé samedi, était l'un des principaux opposants du président Omar al Bachir.
Tourabi, qui fut l'une des personnalités les plus influentes du pays, avait formé le PCP en 1999 pour défier dans les urnes le président Omar al Bachir et son Parti du congrès national, dont il avait longtemps l'un des proches alliés.
En 1989, après le coup d'Etat militaire ayant porté Bachir au pouvoir, il avait été nommé ministre des Affaires étrangères puis élu en 1996 à la présidence du parlement. À la suite de sa rupture avec Bachir, Tourabi avait été emprisonné plusieurs fois.
L'hôte de ben Laden
Tourabi avait hébergé dans les années 1990 le fondateur d'Al Qaïda, Oussama ben Laden. La CIA a d'ailleurs révélé, mardi, que ce dernier avait caché des millions de dollars au Soudan pour financer le djihad.
Considéré par nombre d'analystes comme le père spirituel des islamistes soudanais, Tourabi a écrit de nombreux essais sur l'islam politique et conduit dans les années 1970 le Front islamique national, un mouvement poussant à une islamisation du pays.
Mauvaise nouvelle pour le dialogue national au Soudan
Il s'était impliqué dans le dialogue national prôné en 2014 par Bachir pour réduire les divergences entre les forces politiques soudanaises, processus qui n'a guère progressé.
"Sa disparition soudaine du champ politique aura un effet déstabilisateur sur le dialogue national réclamé par le président Bachir. Avec sa mort, ce dialogue national a perdu son principal partisan", estime le politologue Mohamed Latif.
Biographie
La vie politique d’Hassan al-Tourabi a été mouvementée. A ses débuts, le Soudanais tout juste diplômé en droit apparaît comme un solide allié d’Omar el-Béchir lors du coup d'Etat de juin 1989 qui le portera au pouvoir. A l’époque, l’idéologue du régime devient très vite le mentor du président.
En 1995, il est élu président du Parlement du Soudan. Mais quelques années plus tard, l’amitié entre les deux hommes s’effrite. En 1999, l‘élu essaie d’évincer Omar el-Béchir du pouvoir, mais la tentative échoue. En réponse, le général dissout l’instance.
Mais, les amitiés du Soudanais avec les terroristes du Moyen-Orient lui valent des ennuis. En cause : le rapport de la Commission nationale sur les attaques terroristes contre les Etats-Unis le soupçonne d’être l'un des principaux soutiens d’Oussama Ben Laden en Afrique. Omar el-Béchir, qui redoute l'isolement du Soudan sur la scène internationale, s'en débarrasse et le fait emprisonner en l'accusant de tentative de complot.
Plusieurs fois incarcéré
Au cours de sa carrière politique, l’éminence grise a multiplié les allers-retours en prison. Depuis 1999 et son éviction du pouvoir, il est très régulièrement accusé d’être le cerveau du Mouvement justice et égalité, le groupe rebelle darfourien de Khalil Ibrahim, arrivé aux portes de Khartoum en mai dernier.
En 2009, Hassan al-Tourabi fait son énième coup politique : il invite le président soudanais à se livrer à la justice internationale, considérant Omar El-Béchir comme « politiquement coupable » de crimes commis au Darfour. Il est emprisonné pendant deux mois. A sa sortie, il annonce quitter la vie politique.
Fraudes électorales
D’autres motifs l’emmèneront derrière les barreaux : comme en 2011, lorsqu'il déclare publiquement que le Soudan a besoin d'une « révolution à la Tunisienne ». Et comme en 2010, lorsqu'il dénonce des fraudes aux élections.
Fondateur des Frères musulmans soudanais et chantre d'un panarabisme islamiste, cet idéologue n'a cessé d'étendre son influence. Il défend la révolution islamique mondiale qui partirait du Soudan. En 1983, alors qu’il est ministre de la junte de Gaafar Nimeiry, il promeut la mise en place de la charia, la loi islamique qui déclenchera une guerre civile de 22 ans avec le sud du pays.
Ces dernières années, il est arrêté à plusieurs reprises sans jamais cesser ses critiques acerbes contre le pouvoir. Récemment, Hassan al-Tourabi a bénéficié d'un retour en grâce : Omar el-Béchir et lui se serrent la main en mars 2014 pour la première fois en quinze ans.
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