Un décor de business accompagne les obsèques de Papa Wemba

Les larmes ont presque séché au Palais du peuple. Place au m’as-tu vu ! Au deuxième jour des obsèques de Papa Wemba, hier mardi le 03 mai au siège du Parlement rd congolais, les pleureurs ont disparu au profit des adeptes du paraitre. En file indienne, des adorateurs de la mode se sont prosternés devant le cercueil de leur "pape" ou « roi ». La procession n’a rien à voir avec celle des acolytes de l’église catholique. Ici, chacun exhibe la "Griffe". C’est plus le nom du styliste qui est mis en exergue. Manière très originelle pour ces friands de la mode, de rendre un dernier hommage à leur précurseur Papa Wemba, qui repose désormais pour l’éternité.

Par ailleurs, des vendeurs de tous bords ne manquent pas à l’appel. Des marchandes d’oranges, en pagnes et coiffées de Képis blancs frappés de l’effigie de la star décédée, étalent leurs marchandises à même le pavé. D’autres préfèrent la vente à la criée. Des tenanciers de restaurants de fortune, communément appelés "Malewa" dans l’argot kinois, ne sont pas non plus en reste. Un peu plus loin, des bouchers en longues blouses bleues, offrent de morceaux de viande de chèvre grillée, à la manière d’un barbecue. Ce sont des "Nganda Ntaba". A l’occasion des funérailles du "Roi de la SAPE", ces petits établissements d’abattage ont du prendre leurs quartiers dans les alentours du Palais du peuple.

Des vendeurs de pains et d’arachides aussi.

Dans un contexte de marché ouvert à tout le monde, d’autres Kinois proposent à la vente des pins avec effigie du Chef de l’Etat. Des photographes font les pieds de grue, espérant accrocher des clients potentiels. Des vendeurs de gerbes de fleurs aussi. Des gammes variées de jus, en petites bouteilles de 30 Cl, viennent allonger la liste. La bière à flot, est servie à la pompe d’une grande société brassicole, sponsor attitrée des productions de Papa Wemba. Pour tout dire, les obsèques de "Bakala Dia Kuba 100% star", ont donné lieu au business aussi bien dans l’enclos que dans les alentours du Palais du peuple. Néanmoins, les inconditionnels des avenues Dibaya et Enseignement ne décolèrent pas.

Une vitrine politique opportune

Les funérailles de Papa Wemba ont-elles atteint leur étape politique au Palais du peuple ? C’est peut-être le cas de le dire. Tout celui qui a suivi le déroulement de la manif hier, soit à la télévision, soit sur place au Palais du peuple, doit avoir entendu le modérateur qui invitait les différentes personnalités selon leurs obédiences politiques. La Majorité présidentielle ainsi qu’une faction de la plurielle Opposition politique, ont été conviées au recueillement. La Société civile, dans toute sa diversité, n’a pas non plus été mise en marge.

Cependant, en plus de cette séquence qui semble bien officielle, un fait saute aux yeux. Il s’agit de ces acteurs politiques rd congolais qui se sont répandus en déclarations. Malgré le pari gagné du ministre de la Culture et des Arts, Baudouin Banza Mukalayi qui a interdit toute récupération politique des funérailles de Papa Wemba, nombre de Politiciens ont défilé devant le micro et la caméra de la RTNC. Question de plus de visibilité. Marketing politique oblige ! Et, dans un contexte de deuil comme celui-ci, nul ne saurait le leur interdire.

Quand la "wembaphilie" dépasse les clivages politiques

On peut tout dire. L’un de nombreux côtés positifs du décès de Papa Wemba est son caractère unificateur. Mort, le Chef du village Molokaï a réussi à rassembler les Congolais. Tous les acteurs politiques ont chanté à l’unisson. Le Gouvernement couvert d’éloges. Et, le président de la République, Joseph Kabila, se trouve au top dans les cœurs des Kinois, du fait de son implication totale dans l’organisation réussie des funérailles. C’est impressionnant. Certains diraient même que c’est exceptionnel. Fallait-il qu’une icône de la musique congolaise meure pour qu’enfin, les Congolais puissent se mettre tous d’accord ? Pourvu que ça dure.

Toujours est-il que quiconque connait les politiciens congolais, ne devrait pas se bercer d’illusions. Bien loin de la récente victoire des Léopards au Chan/Rwanda 2016 qui avait rendu tous les Congolais fiers de leur pays, la flamme s’était éteinte. Car l’événementiel, le sporadique, l’éphémère est le lot de Congolais. Très peu de conviction profonde. Bien triste. Car, après les obsèques de Papa Wemba qui, près de deux semaines, ont fait oublier les débats politiques dans les esprits des Congolais, les acteurs politiques vont reprendre leurs manteaux de guerrier. Pourtant, l’élan observé durant les obsèques de Bokul, pouvait être consolidé afin de résoudre certaines questions sensibles, liées à la vie du pays.