Lexxus Légal : "Les dialogues politiques du Congo ne traitent jamais des questions de fond du peuple"

Artiste engagé, Alex Dende alias « Lexxus Légal » est considéré comme leader du mouvement Hip Hop congolais. Dans son dernier album « Leop'Art », il peint la société congolaise où il est né, vit et travaille. MCNTEAM est allé à sa rencontre et le rappeur a fait le bilan à mi-chemin de son album, excavé le dialogue politique, et décliné son calendrier artistique. Entretien.

MCNTEAM : Après plus de 8 mois sur le marché de disque, quel bilan faites-vous de votre opus « Leop'Art »?

Merci pour l'intérêt. C'est vrai que j'ai sorti Leop'Art le 17 janvier 2016 au Congo. S'il y a un bilan à faire, c'est d'abord l'attention qu'il a suscitée auprès du public. Par son écriture, son contenu et par des options prises. Comme je l'ai dit :
« on a brisé le silence sans handicaper la parole ».

Leop'Art est un album 2016-2017 pour le Congo. Avec l'évolution du pays, les gens se rendent compte qu'on a été assez visionnaire. Et actuellement, certaines choses qu'on a dites dans cet album sont en train petit à petit de se concrétiser. Donc, on sera plus en
actualité quand nous allons sortir les clips d’un certain nombre de chansons qui restent.

Est-ce qu'il y a des chansons plus demandées que les autres ?

Oui, mon dernier concert l'a démontré largement. Des morceaux comme ''Congo bololo'', autant d’autres titres que je croyais impénétrables comme ''Incompris '', ou ''Chez nous'' dans lequel, j’ai repris la mélodie de Ferré Gola, tous ces titres sont
très sollicités lors de mes spectacles.
Comme les gens le savent, je ne suis pas un artiste qu'on joue dans des bars et fêtes. Cependant, on a beaucoup plus de retour positif et on est fier de voir l’album aller plus loin, sans employer beaucoup plus d'énergie pour la communication, vu la difficulté qui entoure cet aspect. Mais ça commence à entrer et les gens cogitent aussi autour de ça.

« Congo bololo » n'est-elle pas une chanson prophétique pour l'avenir du Congo ?

(Rire) ... Non, Je parlerais plutôt du titre ‘Leop'Art’ que « Congo bololo ». Les gens définissent « Congo bololo » comme étant un titre sanction, parce que « la vraie démocratie habite la rue », « Élections », « troisième mandat », etc. Mais, moi je le définis
comme une chanson d’« éducation civique ». Les gens veulent les élections, tôt ou tard, peu importe le temps, elles seront organisées.

Et malheureusement le titre sera toujours d'actualité pendant les périodes à venir. Mais la chanson qui donne cette impression là d'être prophétique, c'est Leop'Art. Bizarrement les Congolais ne lui ont pas encore prêté beaucoup plus d’attention. Peut-être parce que dans ''Congo bololo'' il y a beaucoup plus de lingala.

« Agressé par des lois, le peuple a droit de se défendre, article 64 légitime défense », le titre a valeur d'un tract d'une défiance. « A vos gardes, le peuple a un instinct d'un félin affamé, Leop'Art''. Et à la fin de cette même chanson je dis ''Yebela, kidiba kolo'' alors que je l’ai fait en 2014, je suis moi même surpris que "Yebela" devienne le cri de guerre et soit utilisé d'une manière que l'on sait.

Une frange de notre classe politique est en pleine discussion dite « Dialogue national ». Etant peintre de la société, avez-vous un avis ?

Depuis les années 60, toutes les messes politiques du Congo ne traitent jamais de la question sociale. Alors Jamais les questions de fond du peuple. Ils ont essayé pendant la Conférence nationale souveraine, mais n'ont pas pu puisque la matière a été vraiment abondante. La preuve, ils ont rejeté les conclusions. Ils ne parlent jamais du social.

Quand l'ONU a sorti la résolution 2277, qui donne la légitimité à ce Dialogue, qui est ce politicien qui est venu l'expliquer ? Tous parlent au nom du peuple, quand on regarde au fond que des crises politiciennes. Qui parle de nous ? Personnellement, je n'ai pas été consulté. D'ailleurs la Ceni est composée de la Société civile, l'Opposition et la Majorité, tous, à un moment, perdent leurs casquettes mais qui a démissionné parce qu'ils n'ont pas reçu les moyens pour organiser les élections ? Les matières contenues dans ce dialogue sont, tout à fait, politiques pour résoudre les égos de gens.
Malheureusement notre avenir se joue aussi dedans puisque eux se sont montrés beaucoup plus courageux que nous. De vrai, je regarde ça de loin.

Comment se présente votre calendrier ?

En principe le 22 septembre 2016, je dois jouer en Belgique ; le 22 octobre je fais un gros concert « Leop'Art » à la Halle de la Gombe. Le 22 novembre je serai à Paris à Bobigny, et ce sera après une grande première, une conférence aux sciences Pô (Sciences politiques, ndlr) après celle de Nouakchott en Mauritanie dans le département économique. Mon plus gros souhait est d'aboutir à une tournée à l'intérieur du pays.

On travaille d'arrache-pied pour mobiliser les moyens.