Maï-Ndombe : la pêche aux cœurs des vies à Mushie

Dans la plupart des villages du secteur de Bukala, territoire de Mushie, province de Maï-Ndombe en RDC, la pêche demeure la principale activité pour survivre et subvenir à d’autres besoins. Cela se fait souventt au Lac Maï-Ndombe, très reconnu poissonneux dans ce coin du pays. Cette besogne se fait avec des moyens très rudimentaires : pirogues, nasses, ficelles, hameçons, pièges de pêche voire des filets manuels. Les pêcheurs quittent des localités très éloignés par rapport au lac : de 60 à 150 km. Bokoni, Ibya, Binshe, Bitula, Karavani, Nakabanku, Kibambili sont les localités les plus concernés.

Sona Munge, 43 ans, est très actif. Depuis plus de vingt ans, il ne change pas de profession. Il affirme qu’il a gagné sa vie grâce à cette activité. Il habitait d’abord Pandomaye, une localité du secteur de Bukala, située à plus de 50 km du lac Maï-Ndombe, son site de référence pour la pêche, avant de s’installer à Bandundu, sa ville domiciliaire. « Matin, soir tout comme la nuit à l’aide des torches, je jette mon filet au bord du lac quand je n’utilise pas ma pirogue et j’attrappe plusieurs sortes de poisson [‘’clupeidac’’ connu sous le nom de ‘’Ndakala’’, ‘’clarias’’ soit ‘’Ngolo’’, ‘’malapteruridac’’ appelé autrement ‘’poisson électrique’’, etc.]. Dans ce filet, l’on a des fois des grenouilles, et plusieurs autres reptiles », témoigne-t-il.

Selon lui, D’un lieu à un autre, quelques prédateurs comme le martin pêcheur, la tortue, la gerbe se font prendre. Déjà dans le filet, beaucoup de poissons s’échappent et rentre dans l’eau. La pêche se complique quand le filet embrasse des débris sous-marins. Il faut nécessairement plonger pour le récupérer en bon état. Il ajoute qu’après la pêche, la vente  se fait soit au bord du lac avec les *Mamans maboke* (femmes vendeuses des colis rôtis), soit au marché, soit encore de maison en maison. « Les colis déposés par tas au bord du lac se vendent à 500 FC et l’on peut facilement encaisser plus de 60.000 Francs congolais '50 dollars' par jour. Le colis des gros poissons [‘’ophiocephalidae’’ autrement appelé ‘’Mungusu’’ ;‘’hepsetidae’’ soit ‘’Mbenga’’] se vendent à plus ou moins 5000 FC [4,5 dollars] la pièce ; sans oublier les crevettes, les crabes dont la moitié est réservée pour le repas du soir au lieu du campement ou à la famille d’accueil », dit-il.

Un autre pêcheur du coin, Sylvain Mpuka, déclare qu’il a un bon souvenir de son travail : « N’eût-été cette activité, je n’allais pas scolariser mes enfants et construire ma maison de 60 tôles. Dieu a très bien fait de rendre poissonneux notre lac Maï-Ndombe. Par mois je gagne près de 600 dollars », se réjouit-il.

« Parmi les difficultés rencontrées figurent des vagues contre lesquelles il faut se protéger, y compris de nombreuses taxes perçues sans documents. Quelques fois nous donnons des colis de poissons aux percepteurs. Les pêcheurs réticents se voient confisquer leurs filets et paniers qui leur coûtent des yeux de la tête. Même situation pour les poissons vendus au marché », renseigne Munge. Il ajoute qu’il y a des pêcheurs sans autorisation et qui ne respectent pas la règlementation en la matière. Il craint la disparition de beaucoup d’espèces à force de consommer des fretins, des œufs des poissons et des femelles. « La pêche a produit ses effets dans de diverses familles », rassure Jérémie Kambole, le fils ainé de cette famille que nous avons interrogé à l’Institut Bongisa à kikwit. « Les recettes de la vente des poissons ont permis à papa de nous procurer une concession de 750 dollars à Bandundu-ville où nous sommes à présent. D’autres poissons sont à consommer », renchérit-il.