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Infos congo - Actualités Congo - 08 Mars 2024
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Société

Affaire Julienne Mpemba: des enfants congolais qui n’étaient pas orphelins…

2017-05-16
16.05.2017
2017-05-16
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« Lorsque, pour la première fois, en octobre 2013, l’organisme d’adoption m’a remis la photo d’une petite Congolaise, quelque chose s’est passé au plus profond de moi et d’emblée j’ai aimé celle qui allait devenir ma fille.

L’ « apparentement » (c’est-à-dire la procédure d’attribution d’un enfant destiné à l’adoption) avait eu lieu, des jugements favorables avaient été prononcés, en Belgique comme au Congo, tout semblait en ordre sur le plan légal. Ne restait plus qu’à attendre que se termine le moratoire décidé en novembre 2013 par les autorités congolaises, qui avaient momentanément bloqué les départs d’enfants.


Alors que l’attente se prolongeait, les choses se sont gâtées : la deuxième photo ne montrait pas la même enfant, je ne reconnaissais plus « la mienne », beaucoup plus jeune que la fillette de sept ans que j’avais sous les yeux…La troisième photo était encore différente, mais à mes questions, l’organisme d’adoption répondait que je n’étais pas capable de reconnaître des enfants congolais, comme si tous se ressemblaient…Entretemps un psychologue belge avait été envoyé à Kinshasa afin d’en avoir le cœur net mais sans résultat.

De son côté, l’association Toumaini avait installé les enfants dans un nouvel orphelinat car le premier était vraiment misérable, nous avions du envoyer de l’argent, 400 euros par mois, pour subvenir aux besoins de l’enfant… » Lorsque la fille de Mme R est arrivée, après deux ans d’attente et une date de naissance qui ne correspondait pas, les débuts ont été difficiles : « la petite était violente, révoltée, elle hurlait. Il m’a fallu longtemps pour établir la confiance… »Si aujourd’hui les relations entre Mme R et la petite fille se sont apaisées, le cauchemar n’est pas pour autant terminé : « lorsque j’ai vu les images ramenées de Gemena (province de l’Equateur) par le journaliste de Het Laatste Nieuws, j’ai bondi : il apparaissait que des enfants avaient été enlevés à leur famille, sous prétexte d’un bref séjour de vacances qui leur était proposé à Kinshasa et que de là, ils avaient été envoyés en Belgique ! »

Se demandant si sa fille était réellement orpheline, ou si elle avait été victime d’un enlèvement, arrachée à ses parents biologiques, Mme R s’est portée partie civile et a consulté Me Beauthier.

M et Mme C sont tout aussi angoissés : eux aussi avaient constaté que les photos changeaient, que ni les âges ni les noms ne correspondaient et aujourd’hui, ils sont persuadés du fait que la petite T, lorsqu’elle a pris l’avion pour la Belgique, venait d’arriver de l’Equateur cinq jours seulement avant le grand voyage vers l’Europe! Eux aussi se sont constitués partie civile, et les images ramenées de Gemena par le journaliste flamand les hantent : « nous aimons la petite T. comme notre fille, elle s’est habituée à nous, elle fait partie de la famille. Mais sans arrêt, nous pensons à la maman là bas, à l’avenir de notre fille… A l’école, depuis la diffusion de ces images venues du Congo, ne va-t-on pas lui poser des questions, raviver ses souffrances ? »

La colère des parents à plusieurs cibles : elle vise d’abord les organismes d’adoption en Belgique, Sourires d’enfants et Larissa (qui ont fusionné) et Toumani, leur correspondante au Congo, chargée de « découvrir » les enfants susceptibles d’être adoptés et de les héberger, aux frais des parents candidats à l’adoption. Elle se dirige aussi vers les responsables de l’ACC (autorité centrale communautaire) chargée de l’adoption, et en particulier le directeur Didier Dehou, vers le psychologue , vers la juriste… Ces fonctionnaires, avec un rien de condescendance, ne répétaient ils pas aux parents inquiets que tout était sous contrôle, vérifié, certifié, ne réitéraient ils pas leur confiance à l’égard de Mme Julienne Mpemba, qui faisait le lien entre les organismes belges et Toumaini à Kinshasa ?

Après la levée du moratoire décidé par les autorités congolaises (sous la pression des représentants des Etats Unis, du Canada, de la France, de la Belgique, eux-mêmes harcelés par les organismes d’adoption et par certains parents…) n’aurait il pas fallu faire preuve de prudence ? Interpréter des signes inquiétants, comme le fait qu’à plusieurs reprises, le personnel congolais de Toumani avait séquestré les enfants à la veille de leur départ pour la Belgique, exigeant d’être payé ? N’aurait-il pas fallu s’interroger sur le déménagement de l’orphelinat, sur la crise financière traversée par les organismes d’adoption, sur les montants croissants réclamés aux parents : « le coût total de toute la procédure s’élève à 18.000 euros » nous explique un grand père, tandis qu’un couple a du contracter un emprunt et que plusieurs parents absorbés car cette affaire ont perdu leur emploi…

Il est vrai que Mme Julienne Mpemba, fondatrice de Toumaini, avait de quoi convaincre : juriste de formation, cette belgo-congolaise est fonctionnaire à la Région wallonne, elle figura sur la liste PS à Thuin tandis qu’au Congo, elle jouissait de la protection du tout puissant Evariste Boshab lorsqu’il était ministre de l’Intérieur. Depuis novembre 2016 cependant les choses se sont gâtées : le Parquet fédéral a ouvert un dossier avec la suspicion de séquestration d’enfants et de trafic d’êtres humains, Mme Mpemba a été arrêtée puis remise en liberté, des perquisitions ont eu lieu au cabinet de Rachid Madrane qui a succédé à Evelyne Uyttebroeck au poste de Ministre chargé de la Famille à la communauté française.

Le reportage publié par Het Laatste Nieuws jette désormais le doute sur toutes les adoptions réalisées au départ du Congo par Toumaini et les associations correspondantes en Belgique, avec l’approbation de la communauté française: combien d’enfants étaient ils réellement orphelins ?

Adoptions: le malentendu Nord-Sud

Ce nouveau développement dans la saga des adoptions en provenance du Congo illustre, si besoin en était, la profondeur du malentendu : si les fonctionnaires en charge des dossiers finissent souvent par céder et déclarer recevables des cas qui mériteraient à tout le moins plus ample examen, c’est parce qu’ils sont soumis à d’intenses pressions. Les familles européennes désireuses d’adopter un enfant originaire d’un pays dit du « Sud » considèrent souvent que l’adoption est un « droit » et que leurs représentants politiques autant que les fonctionnaires chargés du dossier, doivent tout mettre en œuvre pour satisfaire ce désir légitime. Cette demande pressante, impérieuse, peut pousser les responsables à réduire le temps consacré à l’examen des cas, à faire confiance à des intermédiaires bien introduits ou présentant bien, à se passer de visites sur le terrain ou de vérifications trop précises.

A ces négligences s’ajoutent, parfois, les méprises d’ordre culturel : en Afrique, dans des familles très pauvres, où les parents ne peuvent ni nourrir leurs enfants ni payer leurs études, il arrive que les jeunes soient confiés à des parents plus fortunés, cette « cession » momentanée ne signifiant pas pour autant un abandon définitif des droits parentaux. Dans ce cas, le malentendu vécu par les familles d’adoption est total : elles croient recevoir la charge, ou le cadeau, d’un véritable orphelin, qu’elles pourront chérir et considérer comme un membre à part entière de sa nouvelle famille et non d’un « pensionnaire » momentané…


Comment ne pas relever aussi un autre aspect du malentendu : combien sont-ils qui sont convaincus, en toute bonne foi, du fait qu’un enfant originaire d’un pays pauvre aura de toutes manières plus de chances de s’épanouir dans une famille aisée, aimante, dans un pays doté de bonnes écoles, que dans son milieu d’origine ? Quels sont les droits de l’enfant ? Quels sont les droits de sa famille, de sa communauté ? Y pense – t on vraiment, tant sont écrasants les avantages matériels à court terme et prometteuses les perspectives d’avenir ?


Une dernière observation s’impose : alors que tout le monde est d’accord pour que des contrôles soient opérés, afin de garantir tant les droits des enfants que ceux des familles adoptantes, est-il bien raisonnable de maintenir ouvertes les filières de l’adoption internationale dans des pays tels que le Congo, où l’Etat est encore défaillant, où, trop souvent, tout se vend et tout s’achète ? Y compris des êtres humains…

Adoptions: après le moratoire congolais, les opérations ont continué

En novembre 2013 un moratoire adopté par le gouvernement congolais jetait le trouble dans le monde de l’adoption internationale : troublé par des accusations faisant état d’enfants qui auraient été «vendus » au Canada et aux Etats Unis et envoyés dans des couples monoparentaux, le président Kabila décrétait la suspension de tout départ du Congo d’enfants destinés à rejoindre des familles d’accueil.

Désireux d’y voir plus clair, le président voulait aussi que soient vérifiées les allégations selon lesquelles, Outre Atlantique, des enfants congolais auraient fait l’objet d’un trafic lucratif et auraient, dans certains cas été adoptés par des couples homosexuels, hypothèse choquant profondément l’opinion nationale. Depuis la France, les Etats Unis et aussi la Belgique, les réactions furent nombreuses, les pressions se multiplièrent sur Kinshasa afin que soit levé le moratoire et les missions diplomatiques à Kinshasa se faisaient le relais des pressions exercées par les parents et les organismes d’adoption inquiets de voir se fermer le” marché” congolais.

Les nouveaux développements enregistrés, en Belgique cette fois, devaient cependant démontrer à posteriori le bien fondé de la prudence des autorités congolaises.

Au moment du mpratoire, encouragées par les organismes d’adoption, ept familles belges, fortes de jugements favorables déjà prononcés, tant au Congo qu’en Belgique, firent le voyage de Kinshasa en espérant pouvoir ramener des enfants qu’elles considéraient déjà comme leurs. Après sept mois d’attente, au cours desquels les familles furent hébergées gracieusement dans des locaux de l’ambassade de Belgique et soutenues moralement par la délégation de la Fédération Wallonie Bruxelles, les dossiers finirent par se débloquer et les familles, avec leur enfant congolais, purent regagner la Belgique. La joie de la réunification fit oublier tous les déboires, parmi lesquels les sommes importantes réclamées par l’organisme congolais d’adoption, Toumaini et l’organisation partenaire belge Larissa, qui entendaient non seulement faire couvrir tous les frais d’hébergement des enfants mais aussi permettre l’accueil de nouveaux candidats à l’adoption internationale.

Par la suite, en dépit des avis de prudence émis par de nombreux spécialistes, les adoptions au départ du Congo se poursuivirent, principalement mises en œuvre par Larissa et sa partenaire congolaise Toumani, sous la houlette de Mme Julienne Mpemba, une Namuroise qui fi, à chaque occasion, faisait état de nombreux soutiens sinon protections, en Belgique du côté du PS et à Kinshasa du côté du ministre de l’Intérieur de l’époque Evariste Boshab. Depuis novembre 2016 cependant, il semble que les choses soient en train de se gâter : le Parquet fédéral a ouvert un dossier à l’encontre de Mme Mpemba, qui a été arrêtée puis remis en liberté et des persquisitions ont eu lieu au siège du ministre chargé de la Famille à la Communauté française Rachid Madrane successeur d’Evelyne Uyttebroek. En outre trois familles se sont portées partie civile et ont chargé Me Beauthier de poursuivre l’affaire.

C’est qu’un reportage publié par le quotidien het Laatste Nieuws a confirmé les craintes des familles, déjà nourries par plusieurs indices préalables : les enfants arrivés en Belgique ne ressemblaient pas aux photos déjà envoyées depuis le Congo, les âges ne correspondaient pas et les petits candidats à l’adoption ne répondaient pas au nom qu’ils étaient censés portés. Comme si, une fois arrivés à l’orphelinat de Kinshasa, leur nom avait été modifié afin d’effacer toute trace de leur famille et de leur lieu d’origine ! D’où le soupçon terrible qui hante les familles d’adoption : ces enfants sont ils réellement orphelins ou ne seraient ils pas plutôt les victimes d’un trafic d’êtres humains ?

Les assurances données par les fonctionnaires de la communauté française en charge de l’adoption internationale ne rassurent pas davantage les familles : durant longtemps, en dépit d’indices inquiétants, ils ont maintenu leur confiance envers les organismes d’adoption, belge et congolais, les frais ont été considérés comme normaux , sinon inévitables alors que, s’élevant parfois à 18.000 euros au total, ils grevaient lourdement le budget des familles belges.

Dans certains cas cependant, les frais d’hébergement exigés par l’orphelinat kinois, qui s’élevaient à 400 euros par mois, ont-ils été ramenés à 200 ! Des parents qui se sont rendus à Kinshasa ont rapporté le contraste entre les conditions plus que modestes règnant à l’orphelinat et le train de vie des responsables congolais de l’adoption qui « rouleraient carrosse »….

Le reportage paru dans “het Laatste Nieuws” a achevé de jeter le doute : il apparaît que dans l’un des villages d’origine des enfants, situé près de Gemena, à 800 km de la capitale, dans la province de l’Equateur, les parents biologiques se demandent où sont passés leurs enfants, qu’ils avaient accepté d’envoyer à Kinshasa pour une période présentée comme de courte durée et démentent catégoriquement avoir jamais voulu les abandonner sinon les vendre…DEs parents congolais assurent aussi être menacés et accusés de « sorcellerie » s’ils posent trop de questions…
Ces révélations, confirmant des doutes antérieurs, ont jeté les familles belges dans l’angoisse et trois couples se sont portés partie civile…


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