Afrique
La cour africaine des droits de l'homme et des peuples (CADHP) avait donné six mois au Rwanda pour rétablir Victoire Ingabire dans ses droits. La présidente d'un des principaux partis d'opposition du pays, les FDU, est en prison depuis 2010, arrêtée peu de temps après son retour au Rwanda alors qu'elle était candidate contre Paul Kagame. Elle a été condamnée à quinze ans de prison pour « minimisation du génocide ». Mais le Rwanda dénonce une « cour instrumentalisée ».
Pour cette cour africaine, la justice rwandaise a violé le droit à l'expression d'Ingabire et les droits de la défense. Alors que ce délai de six mois est sur le point d'expirer, l'avocate de Victoire Ingabire demande des comptes au gouvernement rwandais, elle a écrit au ministre de la Justice pour protester.
Pire encore, selon Me Catherine Buisman, les conditions de détention de Victoire Ingabire se sont encore aggravées depuis que la décision a été rendue.
« Il y a un silence total après cette décision, donc il n'ont pas du tout pris de mesures. Les autorités n'ont rien fait, mais en plus les conditions d'emprisonnement de Victoire Ingabire en ce moment sont très très dures. Elle n'a plus les droits de parler avec les membres de sa famille, elle n'a plus de visites des membres de son parti [FDU] parce qu'ils sont aussi en prison. Ils jouent un jeu psychologique parce qu'ils cherchent à détruire son moral car c'est une femme très forte. Elle reste la cheffe d'un parti politique opposé au régime. Ils ne veulent pas entendre parler de démocratie ».
Pourtant, pour le gouvernement rwandais, pas question de libérer Victoire Ingabire ou même de prendre en compte la décision de la CADHP. Le Rwanda a claqué la porte de cette cour. « Le procès de Victoire Ingabire a été jugé en premier et dernier recours, et nous avons bien précisé qu'il est impossible pour le gouvernement du Rwanda d'accepter qu'une cour africaine soit instrumentalisée pour essayer de défaire ce que les justices nationales souveraines ont fait, rétorque Olivier Nduhungirehe, secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères. Donc pour nous cette question a été réglée par la Cour suprême qui a définitivement condamné Victoire Ingabire à quinze de prison ».
Outre le cas de Victoire Ingabire, poursuit le diplomate, « il y a aussi d'autres personnes, y compris des génocidaires condamnés au Rwanda, qui ont profité de cette brèche pour utiliser cette cour à des fins politiques. Donc le Rwanda s'est retiré du processus de cette cour et nous estimons que les institutions judiciaires africaines ne peuvent être instrumentalisées à des fins politiques ».
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Victoire Ingabire (D) et son avocat britannique, Ian Edwards, à l'ouverture de son procès à Kigali, le 5 septembre 2011. © AFP PHOTO/Steve Terrill