Economie
Un touriste étranger arrivant en République démocratique du Congo, pour la première fois, se sent aux États-Unis d’Amérique ! Le dollar américain, qui y circule librement, est devenu la monnaie la plus utilisée dans les transactions commerciales sur l’ensemble du territoire. Dans les magasins, les prix sont affichés en dollars, les paiements des biens et services s’effectuent en dollars, les dépôts bancaires sont principalement libellés en dollars, et la majeure partie des transactions des cambistes arpentant les rues porte sur des opérations de change de la monnaie nationale contre du dollar et de l’euro.
Le marché parallèle de change principalement animé par des femmes cambistes, est localement surnommé le « Wall Street », nom inspiré par la place financière de New-York aux États-Unis d’Amérique. La clientèle de ce marché parallèle de change, très diverse, mêle à la population locale des trafiquants, des officiels, des diplomates et des fonctionnaires internationaux. Le bradage de la monnaie nationale s’y produit quotidiennement, au vu et au su de tout le monde. Personne, parmi les acteurs de ce marché, ne semble trouver son existence anormale, ou critiquable, pour le fonctionnement adéquat d’une économie de marché et pour le développement du pays !
AU PAYS OU LE DOLLAR EST ROI
Un touriste étranger pourrait séjourner trois mois dans la capitale ou dans n’importe quelle région du pays sans devoir accepter une seule fois la monnaie nationale, le Franc congolais, car le dollar américain est répandu et préféré dans les hôtels, les restaurants, les transports, les services publics, et même dans les petites alimentations des quartiers populaires.
De l’avis des experts, 95 pour cent des dépôts bancaires et de la masse monétaire sont en dollar américain, ce qui ne laisse qu’une place très marginale à la monnaie nationale. La dollarisation s’est si largement répandue et si durablement enracinée dans le pays que la population s’y est habituée au point que le gouvernement et la Banque centrale ne font plus que très peu d’efforts pour y mettre fin. Les quelques mesures prises contre la dollarisation (dont l’introduction récente des billets de grosses coupures de 1000 Fc, 5000 Fc, 10.000 Fc et 20.000 Fc) restent sans effet.
Ce constat soulève la question de la pertinence de la Banque centrale du Congo et de son efficacité lorsqu’elle prend des mesures de politique monétaire et intervient sur le marché de change. Rarement les hommes politiques congolais ne se prononcent sur l’efficacité de la Banque centrale du Congo, le sujet étant considéré tabou dans le pays. Cette attitude est encouragée par la tradition qui fait que la Banque centrale réagit toujours violemment contre tout article dans la presse qui ose critiquer ou mettre en doute l’efficacité de ses politiques. Cette tradition semble être brisée cette fois-ci par l’Assemblée nationale à l’ occasion de ses commentaires sur le projet de loi des finances 2014.
CRI D’ALARME DE L’ASSEMBLEE NATIONALE
La situation alarmante de la Banque centrale du Congo (BCC) reprise dans le rapport de l’ECOFIN de l’Assemblée nationale laisse entrevoir le doute sur la capacité réelle de la BCC à conduire une politique monétaire crédible.
La situation catastrophique de la Banque centrale du Congo (BCC) figure parmi les considérations données par la commission économique financière et contrôle budgétaire (ECOFIN) de l’Assemblée nationale. Cette commission technique qui a enrichi le projet de loi de finances de l’année en cours, avant le vote intervenu le mardi 21 janvier, a, dans son rapport approuvé en plénière, noté : « la situation alarmante aussi bien patrimoniale que financière de la Banque centrale du Congo est au point où l’Etat doit accroître son intervention pour éviter la faillite à l’institut d’émission congolais… »
Le diagnostic sans complaisance et qui parait tout de même fatal pour l’équipe en place à la Banque centrale du Congo appelle quelques commentaires et constats. Pour des observateurs avertis, la Banque centrale du Congo n’est pas réaliste lorsqu’elle présente au public congolais la stabilité du cadre macroéconomique comme étant un acquis provenant de sa politique monétaire alors que sa propre situation est jugée alarmante tant sur le plan patrimonial que financier.
UNE SÉRIE DE QUESTIONNEMENTS
De ce point de vue, il y a lieu de se questionner si dans un tel environnement, la BCC peut-elle réellement conduire une politique monétaire crédible. Aussi, la Banque centrale du Congo est-elle réaliste lorsqu’elle affirme avoir le contrôle de la situation monétaire et de la politique alors que la dollarisation a atteint 95 % de l’économie, et par conséquent ne laissant à la monnaie nationale, le Franc Congolais, qu’un rôle marginal dans les transactions commerciales en République démocratique du Congo ?
S’il ne faut que s’en tenir aux inquiétudes de la commission ECOFIN de la Chambre basse du Parlement, il faut également se demander si la Banque centrale du Congo est-elle réaliste lorsqu’elle affirme accumuler des réserves en devises de 1,7 milliards de dollars américains alors qu’en même temps, il y a accumulation continue de la dette intérieure que l’Etat ne peut payer par manque de ressources financières suffisantes nécessaires au service de la dette publique ?
SUBVENTIONS SANS CONTREPARTIE
C’est ici qu’il faut comprendre le rôle que doit jouer l’Etat. En principe, il ne doit pas continuer à subventionner la Banque centrale du Congo si celle-ci n’est pas en mesure de se restructurer pour mettre fin à ses pertes chroniques qui s’accumulent depuis plusieurs années et sont devenues une taxe sur les ressources publiques.
Il est de notoriété publique, que dans tous les pays du monde, les banques centrales dégagent du bénéfice provenant de leurs opérations bancaires. A cet effet, l’Assemblée nationale et le Sénat ne devraient pas accepter d’utiliser les ressources publiques et le budget de l’Etat pour éponger les pertes d’exploitation de la Banque centrale du Congo sans exiger de celle-ci un plan de restructuration responsable avec des indicateurs de performance clairs et précis.
AU FINISH
Comment le public congolais peut-il ainsi croire que l’institut d’émission est sur la bonne voie, si l’on ne peut pas lui donner des réponses claires et responsables aux questions ci-dessus soulevées ! cette interrogation est d’autant plus pertinente lorsqu’on constate que, malgré les déclarations répétitives à l’occasion de la tenue des réunions mensuelles du comité de politique monétaire sur la stabilité du cadre macroéconomique justifiant le maintien du dispositif monétaire, le pouvoir d’achat des congolais (qui devrait être la finalité ultime des politiques économiques et monétaires du pays) ne s’améliore pas du tout, soulevant ainsi le débat fond sur l’efficacité des politiques économico-financières du gouvernement et de l’institut d’émission.
Les concertations nationales qui viennent de passer ont-elles pu répondre aux questions que soulève la situation préoccupante et alarmante de la Banque centrale du Congo ? A cette question, le même rapport de l’ECOFIN charge, dans l’ensemble, le gouvernement de la République de la manière la plus claire et directive possible : « Le gouvernement n’a pas pris en compte dans le projet de loi de finances sur le plan politique de manière substantielle, la nouvelle donne politique portée par les résolutions des dernières concertations nationales ». Pour une fois, l’Assemblée nationale s’est prononcée sur la situation alarmante de la Banque centrale du Congo dont on cherche désormais à éviter la faille.
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