Afrique
Pour la cinquième fois, le gouvernement du président burundais Pierre Nkurunziza ne s’est pas présenté à la session de dialogue ouverte jeudi dernier à Arusha par le facilitateur, l’ex-président tanzanien Benjamin Mkapa, et qui s’est clôturée lundi. M. Mkapa avait pourtant retardé d’un jour l’ouverture de la session, du 24 au 25 octobre, pour permettre à Bujumbura de réviser sa position en vain ; le parti au pouvoir CNDD-FDD et ses alliés étaient également absents. Le régime burundais boycotte ces négociations depuis leur ouverture.
“Un mois de deuil”
Cette fois, Bujumbura a justifié son absence par sa décision de faire du mois d’octobre un mois de deuil national mais cette décision n’a pas été coulée dans un texte ayant force de loi pour commémorer les assassinats de deux grandes figures de son histoire politique, Louis Rwagasore (assassiné en 1961) et Melchior Ndadaye (assassiné en 1993, premier président hutu du pays, pour le parti Frodebu, aujourd’hui dans l’opposition). En outre, Bujumbura se plaint de n’avoir reçu ni la liste de participants aux négociations, ni l’ordre du jour.
Ce 5e round de discussions devait avoir pour objet la préparation des élections de 2020. En juin, le président Nkurunziza a annoncé qu’il n’y serait pas candidat. Son pays est plongé dans une grave crise depuis qu’il a annoncé qu’il serait candidat à la présidentielle de 2015, après avoir effectué deux mandats de cinq ans, et cela malgré l’interdiction expresse que lui en fait l’Accord de paix d’Arusha, qui avait mis fin à la guerre civile.
Si M. Mkapa a annoncé que c’était la dernière session qu’il présidait, ni le médiateur en titre, le président d’Ouganda Yoweri Museveni, ni l’East African Community (EAC), qui les a mandatés pour ce travail, n’en tirent les conséquences. Et le 2 octobre, le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine a “réaffirmé” son soutien à la médiation de l’EAC et invité les “parties prenantes” à participer au 5e round de négociations. En vain, on l’a vu.
Le pouvoir dictatorial de Bujumbura est stigmatisé par l’ONU pour la poursuite d’exactions massives envers des opposants avérés et supposés, exactions qui ont provoqué la fuite hors du Burundi de quelque 400 000 personnes, principalement en Tanzanie voisine.
Sanctions européennes
Le président tanzanien John Magufuli exerce de fortes pressions sur les réfugiés afin qu’ils regagnent leur pays, assurant que tout y va bien, tandis que l’Union européenne a renouvelé la semaine dernière pour un an, jusqu’au 31 octobre 2019, ses sanctions à l’égard de quatre Burundais (interdiction de visa et gel de leurs avoirs). Les noms de ces personnes n’ont pas été rendus publics ; on sait qu’il s’agit de personnalités à la Présidence, aux Renseignements, à la police et à l’armée qui font “obstacle à la recherche d’une solution politique à la crise burundaise. Il s’agit notamment d’actes de violence, de répression ou d’incitation à la violence, ainsi que d’actes constituant des atteintes graves aux droits de l’homme”, a indiqué le Conseil européen.
La semaine dernière, la Haute commissaire aux Droits de l’homme de l’ONU, l’ex-présidente du Chili Michelle Bachelet, a tancé le représentant du Burundi, qui avait menacé “de traduire devant la justice” les auteurs d’un rapport de l’ONU publié en septembre et indiquant que de graves violations des droits de l’homme dont des “crimes contre l’humanité” s’étaient poursuivies sans relâche au Burundi en 2017 et 2018.
Enfin, Bujumbura a suspendu le 1er octobre toutes les ONG internationales au Burundi jusqu’à ce qu’elles se conforment à des quotas ethniques qui n’existent légalement que pour les entreprises publiques et qu’elles placent un tiers de leur budget à la Banque centrale. De 60 à 80 % de l’aide au Burundi passe par les ONG étrangères.
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