Religion
Après une vaste polémique, la direction du Festival international de Byblos s’est dite « contrainte » d’annuler le concert du groupe de rock « pour éviter une effusion de sang ».
Le groupe Mashrou’Leila n’aura pas le droit de jouer ses morceaux aux textes engagés dénonçant l’oppression et l’homophobie sur le port antique de Byblos, au Liban. Les organisateurs du Festival international de Byblos ont été « contraints » d’annuler mardi 30 juillet le concert du groupe de rock indépendant pour éviter des violences.
Avec un chanteur ouvertement gay et des textes engagés disséquant des questions sociales et abordant les problématiques LGBT, le groupe Mashrou’Leila, formé en 2008 par des étudiants de l’université américaine de Beyrouth, est accusé d’avoir porté atteinte à la sacralité de symboles chrétiens.
« Dans une démarche sans précédent et suite aux rebondissements successifs, le comité [du festival] a été contraint d’annuler le concert de Mashrou’Leila prévu le vendredi 9 août 2019 pour éviter une effusion de sang et maintenir la sécurité et la stabilité », a annoncé la direction du Festival international de Byblos. « Nous regrettons ce qui est arrivé et nous nous excusons auprès du public », ajoute le communiqué.
Déjà censuré en Egypte et en Jordanie
A l’origine de la controverse : un post publié sur Facebook par le leader du groupe, Hamed Sinno, illustré par un photo-montage où le visage de la Vierge Marie a été remplacé par celui de la star américaine Madonna. Mais aussi deux chansons, Idols et Djin, qui portent atteinte, selon des membres du clergé catholique maronite, aux « valeurs religieuses et humaines ». L’archevêché maronite de Jbeil (le nom arabe de Byblos) avait notamment réclamé l’annulation du concert, dénonçant « les objectifs du groupe et le contenu de ses chansons », qui « portent atteinte dans leur majorité aux valeurs religieuses et humaines et s’attaquent aux symboles sacrés du christianisme ».
L’annonce de l’annulation du concert intervient au lendemain d’un nouvel appel à ce sujet lancé par le centre catholique d’information, une institution religieuse qui collabore avec les autorités en matière de censure artistique et culturelle. La polémique a atteint son paroxysme ces derniers jours, sur fond d’insultes et de critiques virulentes à l’égard du groupe, voire d’incitation à peine voilée au meurtre.
Le groupe de rock, qui détonne dans le paysage arabe, a déjà vu ses concerts annulés dans d’autres pays de la région. En Jordanie, des concerts avaient été annulés en 2016 et en 2017, à la suite notamment de protestations de parlementaires conservateurs. Après un concert du groupe en Egypte en 2017 durant lequel des spectateurs avaient brandi le drapeau arc-en-ciel, symbole de la communauté LGBT, les autorités avaient lancé une vague de répression contre la communauté homosexuelle, procédant à plusieurs arrestations.
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Un concert de Mashrou’Leila au festival du Printemps de Bourges le 26 avril 2015. GUILLAUME SOUVANT / AFP