Culture
Il faut grimper les marches de Montmartre, trouver le buste de Dalida, avant de dénicher la résidence d'artiste qui abrite depuis plusieurs mois, JP Mika, l'un des peintres congolais les plus en vue du moment. Pas de doute : l'exposition « Beauté Congo » en 2015 à la Fondation Cartier pour l'art contemporain a réellement boosté la notoriété de JP Mika, en choisissant des œuvres de l'artiste pour illustrer son catalogue, mais aussi l'affiche de l'exposition. Un choix judicieux, car le style de JP Mika est vraiment personnel : des portraits colorés, empreints de joie et de dynamisme.
Il se réjouit, à quelques jours du vernissage de son exposition « Bisengo », (« la joie » en lingala) à la galerie Magnin-A*. « C'est ma première exposition en individuel en Europe », s'enthousiasme-t-il, les yeux brillants. « Cela représente un gros travail », ajoute-t-il. Une toile nécessite plusieurs mois de travail pour l'artiste, extrêmement soigneux dans les détails.
Donner la joie de vivre
Dans son studio-atelier de la Cité des arts, il peaufine encore un tableau, qui sera peut-être exposé. « Ce que je donne aux gens, c'est vraiment la joie de vivre, l'espoir... Je parle aussi de la Sape (Société des ambianceurs et des personnes élégantes), c'est ma spécialité. Dans mes œuvres, vous devriez puiser des émotions, à travers la couleur, mais aussi beaucoup d'énergie. » En rencontrant Mika, vous avez aussi l'impression de rentrer dans l'une de ses toiles. Il s'habille comme il peint. Le détail sur le tableau, vous le retrouvez sur lui. Il enfile ses bracelets en bois et porte son autoportrait en médaillon.
En résidence d'artiste à Paris pour un an, sa famille est venue le rejoindre. Sa femme et ses quatre enfants… Mais là aussi, il a de grands projets. Il en voudrait huit. Une famille nombreuse, à l'image de la sienne, 4 filles et 4 garçons.
Un talent précoce
Il dit qu'il est « né artiste » : « À 10 ans, je me souviens bien. En classe, c'est moi qui dessinais sur le tableau noir, à la demande des instituteurs, et tous les élèves suivaient. Et puis, après la classe, j'allais reproduire des affiches de film sur des bouts de papier que je vendais à mes camarades de classe. » Dès l'âge de 13 ans, il a commencé à peindre des panneaux publicitaires et sur des bâches, des affiches de film pour gagner de l'argent. « C'est comme cela que j'ai appris la couleur », explique-t-il. Issu d'une famille pauvre, il devra se payer ses études secondaires. En 2003, il intègre l'Académie des beaux-arts de Kinshasa, pour deux ans, puis l'Atelier de recherche en art populaire, de Chéri Chérin, qui deviendra son mentor.
Le tournant de Bilbao
En 2008, la porte s'est ouverte avec une exposition collective, emmenée par Chéri Chérin à Bilbao. « À cette époque, mes tableaux étaient inspirés par ceux de Chéri Chérin et Chéri Samba. Puis j'ai trouvé mon identité, ma signature », détaille JP Mika. Peu à peu il délaisse la figuration narrative pour se focaliser sur le portrait, opte pour des fonds en tissu très colorés chinés sur les marchés ou prépare des fonds très travaillés. Dans l'atelier de Chéri Chérin, il a appris l'art de la composition, de Chéri Samba, il a retenu le souci du détail et la patience. Mais la maîtrise de la couleur, l'éclat, la vibrance de la lumière sont des ingrédients essentiels de sa signature. Il utilise une technique mixte, commence à la peinture à l'huile et poursuit à l'acrylique et à l'encre de chine pour peaufiner ses œuvres.
« L'atelier, c'est moi »
Si on lui demande où est son atelier d'artiste, il répond : « L'atelier, c'est moi. Tout est dans la tête, et au bout de la main et du pinceau. Une toile, je la conçois déjà dans ma tête, pendant plus d'un mois, avant de l'entreprendre. Mais c'est Dieu qui m'inspire. Je m'inspire aussi de ce qui est autour de moi, de ce que j'observe. » Et, il se verrait bien vivre à cheval entre les deux capitales. Un atelier à Paris, un autre à Kinshasa, avec des élèves, autodidactes, à former.
L'influence de Dieu et de la sape
« La gloire de Dieu est dans mes œuvres. Il y a beaucoup d'énergie. Dieu m'inspire, il m'inspire dans ma tête. La première inspiration est divine, mais, par exemple, dans certaines œuvres exposées pour "Beauté Congo", je l'ai renforcée avec l'inspiration des photos de Malik Sidibé et Seydou Keita, pour rendre hommage à ces photographes. Maintenant, je vois qu'au pays, à Kinshasa, des décorateurs veulent faire comme moi. On leur dit : fais comme Mika. Ce n'est pas bien ! J'aime être différent, et mettre cette différence dans mes œuvres. L'artiste que je suis est inspiré. Je ne veux pas être dirigé par quelqu'un. L'inspiration me vient de Dieu. J'en ai beaucoup. Cela coule comme de l'eau, j'ai beaucoup, beaucoup d'idées ».
Son style, c'est aussi celui des sapeurs congolais, et il se peint ainsi. Il n'hésite pas à se mettre lui-même en scène, en sapeur qui pose fièrement, avec cette extravagance savamment étudiée d'un artiste en représentation. Et puis, l'artiste, c'est aussi lui ! Et son chemin, du quartier de N'Djili aux expositions internationales, est aussi celui d'un rêve d'enfant devenu artiste.
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