Monde
L'intervention militaire turque dans le nord de la Syrie, commencée mercredi, est une catastrophe pour les intérêts des Occidentaux et un cadeau fait à leurs principaux adversaires et ennemis dans la région – les djihadistes de l'État islamique, le régime de Bachar el-Assad, la Russie et l'Iran.
Avec cette opération baptisée de façon éhontée « Source de paix », le président turc, Recep Erdogan, cherche d'abord à assurer sa survie politique, quitte à piétiner les intérêts de ses alliés de l'Otan. Le plus ahurissant est qu'il s'est lancé dans l'aventure avec le feu vert préalable des États-Unis, donné dès dimanche par le président Donald Trump.
Erdogan a deux objectifs simultanés : repousser les forces kurdes le plus loin possible de la frontière, afin de les empêcher de créer un proto-État jouxtant la Turquie, et créer une zone tampon d'une profondeur de 30 kilomètres dans laquelle il envisage de relocaliser, on n'ose pas imaginer dans quelles conditions, jusqu'à deux millions de Syriens soit plus de la moitié de ceux qui ont trouvé refuge en Turquie ces dernières années.
Aventurisme extérieur
On a vu ainsi mercredi un État membre de l'Otan, équipé d'avions F-16 américains, bombarder les Syrian Democratic Forces (SDF), dont l'essentiel des combattants est fourni par la milice kurde YPG, le meilleur allié local des Occidentaux dans la lutte contre l'État islamique (Daech). La première cible de l'offensive semble être la ville d'Al Abyad, dont les militaires américains déployés dans la zone se sont retirés depuis l'annonce de Donald Trump dimanche.
De la sorte, Erdogan contribue à déstabiliser encore plus la région et, en s'en prenant à son principal adversaire local, facilite la reconstitution des forces de l'État islamique qui, en dépit de ce qu'a affirmé Donald Trump dimanche, est loin d'être vaincu « à 100 % ». Une inconnue majeure est le sort des milliers de djihadistes de Daech détenus par les SDF – dont de nombreux Français – qui pourraient profiter de l'occasion pour s'échapper. En outre, Erdogan renforce la main de Bachar el-Assad et de ses principaux soutiens extérieurs, la Russie et l'Iran, dont les alliés locaux sont confortés par le départ des Américains et l'affaiblissement des Kurdes.
Que l'aventurisme extérieur d'Erdogan suive de quelques mois les revers cuisants qu'il a subis aux municipales avant l'été n'est en rien une coïncidence. Dans l'analyse des cercles dirigeants turcs, la perte d'Istanbul, d'Ankara et d'autres villes importantes passées aux mains de l'opposition est due en grande partie à l'exaspération de la population contre les quelque 3,7 millions de Syriens réfugiés dans le pays. Prétendre les relocaliser en Syrie vise à apaiser cette colère. Pour Erdogan et son parti AKP, la perte des grandes villes fait peser une grave menace sur le système de financement quasi mafieux mis en place depuis 25 ans pour tirer parti des marchés publics municipaux et de l'immobilier.
« La stratégie de la Turquie n'est pas un simple exercice de géopolitique. Pour Erdogan, il en va d'abord de sa survie politique », observait mercredi Gonul Tol, directeur du Centre d'études turques au Middle East Institute de Washington, sur le site du magazine américain Foreign Affairs.
Asseoir sa suprématie
Toute la politique syrienne d'Erdogan, selon cet analyste, vise à consolider sa suprématie sur la scène politique intérieure turque. Après le début du conflit syrien en 2011, l'homme fort de la Turquie a soutenu les islamistes contre le régime de Bachar el-Assad. Ankara a, pendant plusieurs années, fermé les yeux sur les djihadistes étrangers qui étaient nombreux à transiter par la Turquie pour aller combattre en Syrie, y compris ceux qui allaient rejoindre les rangs de l'État islamique.
Il s'agissait pour Erdogan, à l'époque, de consolider le soutien dont il jouissait dans les rangs islamistes turcs, à un moment où il était lancé dans une grande opération d'islamisation du système éducatif turc. Lorsque ses premiers revers électoraux, en 2015, l'ont contraint à s'allier avec un parti ultranationaliste, il a rompu avec les Kurdes et s'en est pris aux Kurdes syriens, avec déjà deux premières incursions militaires dans le nord de la Syrie.
Les succès militaires des Kurdes contre l'État islamique, avec le soutien des Occidentaux, sont vite devenus un cauchemar pour Erdogan. Les empêcher de créer un quasi-État kurde, du type de celui qu'ils ont créé dans le nord de l'Irak, est devenu l'objectif prioritaire d'Ankara. Depuis 2017, la volte-face est complète. Allié avec les forces pro-Assad soutenues par la Russie, Erdogan, qui a réussi à convaincre Trump de lâcher les Kurdes, montre maintenant le peu de cas qu'il fait des intérêts des Européens.
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