Beni : 5 ans d’insécurité, près de 3 000 morts

Ce mardi 15 octobre 2019, la ville de Beni vient a totalisé 5 ans dans une insécurité à grande échelle, caractérisée par des massacres horribles des civils, des embuscades, des kidnappings, des incendies des maisons, des pillages des biens, des attaques contre les positions militaires et d'autres conséquences. Les autorités congolaises et onusiennes attribuent ces actes aux rebelles ougandais de forces démocratiques alliés(ADF) présents dans cette région depuis près de 20 ans. Les forces armées de la RDC et la brigade de la Monusco attaquent leurs positions, mais l'ennemi essaye de changer de temps à temps son mode opératoire et c'est la population qui en est victime.

5 ans que le sang coule

Une femme pleure au tour du corps de son mari à Mbau

Le tout premier massacre en ville de Beni remonte au 15 octobre 2014, un mercredi, dans le quartier Ngadi en commune de Ruwenzori, 13 jours après celui de deux personnes à Mukoko dans le groupement Bambuba-Kisiki dans le territoire de Beni. Il était près de 19 heures lorsque les assaillants ont surpris les villageois détendus dans la parcelle d'un certain Musedinge, sans aucune inquiétude sécuritaire. La première victime fut un militaire des forces armées de la RDC, connu sous le nom de Matadi. Surpris, chacun va fuir pour sauver vie. À environ 50 mètres de la route nationale numéro 4, c'est une femme et ses deux enfants qui vont être exécutés. Les assaillants ont pris la direction de la plantation Kangida en tuant toutes les personnes rencontrées sur leur chemin ; la plupart des gens étaient tués devant leurs maisons d'habitation et des cultivateurs dans les champs à Kadou, Nzuma, Bamale et environs.

Le lendemain matin, 33 corps des personnes tuées, essentiellement par armes blanches furent ramassés. C'est tout le monde qui pleure, Beni devient noir. Les corps ont été exposés à la tribune du 8 mars, à la mairie, en attendant l'arrivée des autorités provinciales congolaises et onusiennes pour inhumation, dans une tombe commune sous émotions.

Les tueries s’enchaînent jusqu'à embraser la commune voisine de Beu et d'autres villages et localités du territoire de Beni. Les statistiques évoquées par la société civile font état de 3 000 civils tués horriblement, plusieurs centaines de disparus, sans compter des orphelins, veuves et veufs.

5 ans après, la population se souvient encore de ce drame et la terreur et la désolation persistent dans les esprits. Madame Kyabusiki, personne de troisième âge, qui avait perdu 6 membres de sa famille dont ses petits-fils, vit désormais seule et regrette l'absence de ses proches. Elle affirme que les victimes étaient égorgées alors qu'elles étaient en train de manger.

Un triste anniversaire

Les jeunes de la véranda Mutsanga en plein assainissement des tombes des personnes massacrées

Pour immortaliser cette journée du 15 octobre, le maire de la ville de Beni, Nyonyi Bwanakawa Masumbuko a débaptisé le stade municipal de Beni en « stade du 15 octobre ». Ce mardi, les jeunes du groupe de pression véranda Mutsanga ont effectué un travail communautaire au cimetière de Masiani où reposent à jamais les victimes de ces massacres. Ils disent être animés par le sentiment de tristesse envers victimes de l'insécurité entretenue par les ADF.

Une crise humanitaire ignoré !

Suite à des nombreuses attaques répétitives des rebelles, maisons incendiées, champs détruits, plusieurs villages et localités du territoire de Beni et quartiers de la ville de Beni sont vidés de leur population qui cherche à trouver refuge dans des coins plus calmes et sécurisés. La majorité des déplacés vivent dans des camps dans la province de l’Ituri, d’autres dans des familles d’accueil sans du gouvernement congolais.

Pour la seule ville de Beni en commençant à Mavivi jusqu'à Rwangoma, on dénombre plus de 800 orphelins privés de l'amour de leurs parents, décédés dans les différentes incursions. Les acteurs de la société civile et la notabilité ont toujours plaidé pour une assistance aux déplacés et pour l'encadrement des orphelins.

Un espoir qui s'écrit

Avec l'arrivée de nouvelles autorités au pouvoir, les victimes rassurées des promesses distillées, espèrent trouver des solutions à leurs difficultés quotidiennes. Et lors de ses différentes interventions, le président de la république, Félix Tshisekedi, jure d’en finir complètement avec les ADF. Il a procédé au remplacement du commandement militaire de l'opération « Sukola 1 », visant la traque des groupes dans le grand nord de la province du Nord-Kivu. Le commandant suprême des Fardc a procédé au dédoublement des troupes militaires. Les effectifs sont passés de 11 000 à plus de 20 000 hommes.

L'armée en pleine opérations de traque des ADF