Politique
L'incapacité de la RDC à régler ses problèmes, suivi du silence de la communauté internationale, est un drame de notre époque", accuse-t-il, dans un entretien avec l'AFP à l'occasion d'un passage à Stockholm pour y recevoir le prix de la Right Livelihood Foundation pour son action.
"On est dans la 20e année d'atrocités" dans l'Est de la RDC, dit-il, "et je crois que plus les années passent, plus on voit que les groupes, les miliciens améliorent leur outil de torture" malgré l'existence de nombreux textes de loi protégeant les femmes mais dont il juge l'efficacité douteuse.
Il regrette "qu'en ce qui concerne le viol comme arme de guerre, on tergiverse" alors qu'il s'agit d'"une arme qui détruit la femme et la société, qui crée des enfants qui n'ont pas de filiation" et "constitue un véritable génocide" puisque il n'y a plus de procréation possible quand l'appareil génital de la femme a été détruit.
"On a plein, plein de bonnes intentions", dit-il, évoquant notamment la résolution 1325 adoptée en 2000 par le Conseil de sécurité des Nations unies qui appelle les Etats membres à prendre des mesures spécifiques dans la résolution des conflits pour la protection des femmes, en particulier contre le viol.
"Ce n'est pas du sexe"
"Mais il n'y a pas encore une ligne rouge qui soit solide, pour dire: cette limite-là ne peut pas être franchie. Et je crois qu'il faut y arriver" car "les femmes constituent des cibles privilégiées dans l'Est de la RDC", explique le médecin.
"Ce n'est pas du sexe. C'est vraiment utilisé comme une arme de destruction" qui de surcroït "ne coute rien" à celui qui s'en sert. ajoute-t-il.
"Les femmes nous racontent qu'elles ont été violées en public, en présence de leur mari, de leurs enfants. Elles arrivent à l'hôpital avec l'appareil génital brûlé, torturé", rappelle--t-il.
Formé en France, le Dr Mukwege est soutenu financièrement par une fondation suédoise qui, dit-il, lui donne les moyens de soigner ses patientes.
Mais depuis qu'il a été visé par une tentative d'assassinat à son domicile en octobre 2012 il ne sort plus depuis de son hôpital par mesure de sécurité.
"Les menaces persistent dans la mesure où ceux qui ont attenté à ma vie n'ont jamais été présentés à un juge. J'aimerais bien savoir qui ils sont", raconte-t-il.
"Et je crois que le jour où on prendra les bonnes décisions, les gens vont comprendre que si je franchis cette ligne, ça veut dire que je me mets dans une situation dont je ne saurai plus me sortir", insiste le médecin.
"Mais chaque matin quand je vois des femmes qui se réveillent, qui étaient complètement handicapées et qui sont contentes de reprendre une vie normale (...) c'est quelque chose qui vous donne une joie qui compense largement cette perte de liberté", conclut le médecin.
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