Interviews
Mediacongo.net(MCN) : Monsieur le Directeur Général pouvez-vous nous retracer votre parcours académique et professionnel ?
Matata Ponyo (MP) : j'ai fait des études primaires et secondaires
comme tout le monde, j'ai terminé avec un baccalauréat (diplôme
d'Etat) en section commerciale en 1983 à Bukavu. En 1986, j'ai achevé
mon cycle de graduat en sciences économiques à l'Université
de Lubumbashi, puis je me retrouve à l'université de Kinshasa
pour une Licence en Sciences économiques, option économie internationale
et monétaire que j'obtiens en 1988. Je suis ensuite Assistant dans la
même Université où j'assiste le professeur Tshiunza dans
les questions spéciales monétaires. A l'issue d'un concours de
recrutement à la Banque Centrale du Congo, je suis recruté comme
Analyste, je n'avais que 23 ans (1988). Jusqu'en 2000 j'ai travaillé
à la Banque Centrale, à la Direction des Etudes, de Recherche
économique, où j'étais Responsable des comptes nationaux
après avoir presté dans les questions monétaires. En 2000,
je suis recruté par le ministre des finances comme Conseiller en charge
des questions économiques et monétaires, j'y suis resté
successivement comme Conseiller économique, Conseiller macroéconomique,
Conseiller ayant en charge des questions avec le Fonds Monétaire International,
la Banque Mondiale et la Coopération internationale, puis Président
du Comité de Pilotage du BCECO. Le 04 octobre 2003, je suis désigné
par décret présidentiel comme Directeur Général
du Bureau Central de Coordination, fonction que j'exerce jusqu'à ce jour.
Je suis marié depuis 11 ans et père de 4 enfants, 3 filles et
1 garçon. J'essaie de donner le maximum de moi-même du point de
vue professionnel et j'essaie aussi de donner autant que je peux à ma
famille.
MCN : Monsieur le Directeur, pouvez-vous relater la genèse de votre
agence, quelles motivations ont conduit à sa création ?
MT : Il y avait 3 défis majeurs, à relever :
Primo : l'administration n'a pas des capacités institutionnelles
pour pouvoir faire face à la gestion des ressources extérieures
: il n'y a pas suffisamment d'hommes, de femmes compétents parce que
beaucoup se sont exilés pendant les 10 années de la traversée
du désert, les gens ont quitté l'administration publique pour
soit l'étranger, soit pour les entreprises privées.
Secundo : l'administration n'a pas l'infrastructure appropriée et il se pose également une question de confiance. Les bailleurs de fonds voulaient s'assurer d'une bonne gestion des fonds.
In fine : la transparence dans la passation des marchés. Pour
cela il fallait une structure à mesure d'exécuter efficacement
les projets.
Voilà pourquoi la Banque Mondiale et le Gouvernement se sont mis d'accord
pour créer une structure capable de répondre à tous ces
défis, capacité institutionnelle, efficacité et rapidité,
bonne gouvernance, et transparence.
MCN : pouvez-nous nous résumer la structure fonctionnelle du BCECO ?
MP : Le BCECO fonctionne avec deux organes principaux, le premier c'est le comité de pilotage qui joue un peu le rôle du conseil d'administration, dans cet organe vous avez 4 personnes : le représentant du ministre des finances qui joue le rôle du Président du comité de pilotage, deux experts de la présidence de la république, et un représentant du ministre du plan. La direction générale est dirigée par un Directeur général, qui est un expert national recruté par appel d'offres national, et le Directeur Général adjoint, un expert international recruté par appel d'offres international. Par ailleurs nous avons 4 directeurs : un directeur technique qui s'occupe des projets en dehors des projets BAD (Banque africaine de Développement), un directeur de projets BAD, un directeur administratif et financier et un directeur de l'audit interne, et en dessous de ces directeurs, nous avons les chefs de division, qui jouent le rôle de sous-directeurs, et enfin en dessous des chefs de divisions nous avons les chargés de projets et des comptables.
MCN : En tant que Manager, Comment gérez-vous les fonds attribués au BCECO, quels sont vos mécanismes de contrôles ?
MP : nous avons beaucoup de mécanismes de contrôle de gestion,
vous savez que le BCECO c'est une structure qui se trouve à la croisée
de chemins entre les exigences du gouvernement et celles de la Banque Mondiale,
les exigences de la Banque Mondiale étant complexes et plus rigoureuses.
Nous avons des manuels d'organisation et de gestion qui décrivent en
détails comment la structure doit fonctionner, nous avons aussi des manuels
des passations des marchés, qui nous indiquent la recommandation en terme
de passation des marchés, y compris pour des petits marchés, des
manuels financiers et des procédures budgétaires nous indiquent
également comment gérer. Il y a donc un arsenal de documents validés
par le gouvernement et la Banque Mondiale, qui trace le canal de fonctionnement
du BCECO, les codes d'éthiques et le serment de discrétion qui
s'imposent à toutes personnes qui travaillent au BCECO y compris le directeur
général adjoint et le directeur général, enfin nous
avons un organigramme qui établit la distribution des rôles afin
de veiller à l'efficacité de la structure.
MCN: pouvez-vous nous dire quels sont les partenaires principaux de BCECO,
et quels sont les engagements de chacun ?
MP : les bailleurs de fonds du BCECO sont : la Banque Mondiale qui s'accapare la part du lion avec plus de 80 % du financement, suivi de la Banque Africaine de Développement(BAD) qui avoisine les 13 % et le reste c'est le Gouvernement, ça c'est en terme de financement. Pour le moment le BCECO gère une enveloppe d'environ 500 millions de USD pour la gestion directe, et de près de 600 millions de dollars pour les gestions indirectes, ça veut dire nous assumons la passation des marchés, la gestion financière, et les projets sont exécutés sur terrain par d'autres structures, en plus des bailleurs de fonds, nous travaillons avec les entreprises,les bureaux d'études, des ONG, des agences locales d'exécution, là c'est des milliers des partenaires qui nous permettent d'exécuter des tâches sur terrain.
MCN : Sous quelle forme et à quelles conditions se font ces financements ?
MP : Les financements sont accordés à la RDC sous forme des Dons et de crédits. Mais les dons l'emporteraient et les crédits sont à des taux concessionnels.
MCN : Par rapport aux montants des marchés, à combien(pourcentage) estimez-vous la part remportée par les entreprises congolaises ? Que doivent elles faire pour être plus compétitives ?
MP : L'essentiel des ressources sont remportées par les entreprises étrangères qui remplissent les conditions d'éligibilité. Je ne suis pas à mesure de donner le chiffre exact, mais approximativement, je peux soutenir que plus de 70% des marchés sont remportés par des entreprises étrangères. Les entreprises nationales doivent s'améliorer techniquement et professionnellement pour devenir compétitives et gagner davantage de marchés.
MCN : les journées portes ouvertes ont permis de découvrir que le BCECO est au centre de plusieurs projets de développement. Comment expliquez-vous que la population congolaise n'en soit que très peu informée et quelle solution proposez-vous à ce déficit de communication ?
MP : C'est très dommage que les gens ne soient pas bien informés sur le BCECO, nous sommes d'accord avec vous qu'il y a un déficit de communication, ce déficit n'est pas exclusivement justifié par le manque de dispositions prises par le BCECO, vous savez que la communication coûte chère, elle n'est pas gratuite. La source pour assurer ce financement devait plutôt venir du gouvernement, les bailleurs de fonds financent les activités et ils ne financent pas suffisamment la communication, qui au fait, est une activité subsidiaire. Nous pensons en ce qui nous concerne que le gouvernement devrait penser à vulgariser ce qui se fait sur le terrain. Nous sommes limités par le budget mis à notre disposition pour le volet " communication " et " publicité "
MCN : quel est d'après vous le plus grand défi relevé par le BCECO ?
MP : aucune nation ne s'est développée sans éducation, nous avons construit et réhabilité des écoles, plus de 600 centres de santé dans le pays ont été réhabilités par le BCECO, les défis à relever ne sont seulement pas dans le secteur sociaux, mais également dans l'infrastructure, mais beaucoup reste à faire.
MCN : il y a quelques semaines, sur base d'un article publié par un journal français, une vive polémique a éclaté au sujet de la méthode de passation de marchés du BCECO, et il déplorait également l'absence de garde-fous dans l'agence et dans ses différents programmes. Que pouvez-vous dire par rapport aux accusations ?
MT : la Banque Mondiale a répondu à ce journal, et a démenti qu'il n y a jamais eu de détournements de fonds. Je pense qu'un journal dont on connaît le métier, n'est pas mieux outillé que la Banque Mondiale, qui est une institution financière de renommée internationale, pour pouvoir apprécier le détournement des ressources dont elle a mission de gérer efficacement. Si quelqu'un affirme qu'on a détourné l'argent de la Banque Mondiale, l'institution elle-même dément par son représentant résidant au Congo, je ne vois pas pourquoi on peut accorder du crédit aux affirmations de ce journal-là.
MCN : comment voyez-vous l'avenir du BCECO. Le bilan de cinq années d'existence invite-il à quelques changements et adaptations ? Lesquels ?
MP : le bilan est globalement positif, ça ne serait pas très intelligent de dire qu'on a fait cinq ans de parcours sans faux pas, je crois qu'il faut préserver la hauteur professionnelle en reconnaissant les erreurs, mais tout en stigmatisant le fait que les performances sont au-delà de quelques imperfections. Tout le monde est d'avis que le BCECO a fait des réalisations inimaginables en peu de temps. Le pays est très vaste et il est difficile à un kinois de réaliser ce qui se fait à 2 mille kilomètres d'ici. S'agissant de l'avenir du BCECO, cela appartient au gouvernement d'en décider. Je vous rappelle simplement que le BCECO a été créé pour répondre à certains défis de capacités institutionnelles, de bonne gouvernance, de bonne gestion, d'efficacité et de rapidité dans la gestion de projets.
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