Interviews
A la sortie du secondaire, certains étudiants choisissent le droit par dépit ou même par élimination. D'autres encore optent pour cette discipline par " facilité ". Enfin, après avoir fait le tri, il reste les étudiants motivés, passionnés et mus par une soif insatiable d'égalité. Ceux là même qui font de la " justice " le leitmotiv de leur vie. Le professeur Grégoire Bakandeja wa Mpungu fait certainement partie de cette dernière catégorie et, à ce titre, il est l'un des grands piliers de la Faculté de Droit de l'Université de Kinshasa ( UNIKIN). Homme de foi et homme de loi, Maître Bakandeja cumule les diplômes. Ainsi, il s'est spécialisé en droit économique, en droit du commerce international et en finances et développement. Aujourd'hui, Doyen de la Faculté de droit à l'UNIKIN, ce professeur ordinaire est apprécié de tous. C'est donc dans son bureau parsemé de livres et de syllabus que l'avocat nous reçoit. Une fois installés...la séance est ouverte ! D'emblée, il répond à nos questions, sans jargon professionnel, mais de manière naturelle et avec simplicité.
mediacongo.net : Quand avez-vous décidé de devenir professeur
d'Université ?
Maître Bakandeja : J'ai décidé d'exercer ce métier
à la fin de mes études universitaires. En effet, durant mon parcours
académique, j'ai été marqué par les qualités
scientifiques et pédagogiques de certains de mes professeurs. Suite à
cela, j'ai voulu exercer le même métier que ces personnes qui m'avaient
profondément marqué.
mediacongo.net : Qu'est ce qui vous a attiré dans la profession ?
Maître Bakandeja : Je pense qu'il s'agit à la fois de l'aspect
chercheur et pédagogique du métier qui m'a attiré. A cet
égard, je suis convaincu qu'un bon professeur doit avant tout être
un bon chercheur.
mediacongo.net : Justement, qu'en est-il de la recherche et des publications
de nos professeurs d'Université ? Y consacrent-ils assez de temps ?
Maître Bakandeja : Vous le savez, la recherche est une activité
très importante qui exige des moyens financiers colossaux. Qui doit fournir
ces moyens? Est-ce le chercheur ou l'employeur ? Malgré l'absence de
ressources, beaucoup de collègues ont publié des ouvrages, certains
dans des grandes maisons d'édition de renommée internationale.
mediacongo.net : Quelle est selon vous la qualité indispensable à
avoir pour enseigner à l'Université ?
Maître Bakandeja : Il y en a plus qu'une ! Pour moi, un bon professeur
doit faire preuve à la fois de rigueur scientifique, d'honnête,
de responsabilité, de conscience et de moralité. Bien entendu,
ces qualités devraient s'appliquer à tous les membres du corps
professoral : université ou autres.
mediacongo.net : Dans un tout autre registre, pensez-vous que la RDC possède
les armes intellectuelles indispensables à sa reconstruction ?
Maître Bakandeja : Notre pays regorge d'universitaires de haut
niveau, reconnus mondialement. Ce n'est pas pour rien que, chaque année,
plusieurs d'entre eux sont engagés à l'étranger et reçoivent
de très bonnes appréciations de la part de leurs employeurs.
mediacongo.net : Paradoxalement, certains n'hésitent pas à pointer
du doigt le faible niveau voire la qualité médiocre de nos diplômés.
Quelles pourraient être les causes de ces critiques ?
Maître Bakandeja : Comme vous le savez, l'Université reçoit
des étudiants issus de tous les horizons sociaux. Par conséquent,
ces élèves ont reçu chacun une formation qui leur est propre.
Arrivée à l'Université, ces étudiants sont livrés
à eux-mêmes avec pour unique bagage la formation qu'ils ont reçue
en primaire et en secondaire. Et sur ce plan, ils ne sont bien évidemment
pas tous égaux. C'est donc à ce double niveau, primaire et secondaire,
qu'il faudrait être plus exigeant. Comment ? Par exemple, en faisant redoubler
les élèves peu doués, en condamnant sévèrement
la tricherie ou autres antivaleurs.
mediacongo.net : Justement, que préconisez-vous pour remédier
à ces faiblesses ?
Maître Bakandeja : Je conseille à tous ceux et celles qui
sont conscients de leurs faiblesses à opter pour une formation continue.
Les mauvais élèves qui ont triché ou acquis des habitudes
peu recommandables devraient suivre cette voie là plutôt que l'Université.
Bien sûr, il n'y a pas d'âge pour changer et on peut s'améliorer
à tout moment.
mediacongo.net : Il est notoire que la plupart de nos professeurs d'enseignement
supérieur sont dotés de diplômes d'Universités occidentales.
Cependant, il existe toujours certains bémols dans la transmission du
savoir de même que dans l'homologation de nos diplômes. Comment
est-ce possible ?
Maître Bakandeja : En effet, plus de la moitié des professeurs
ont reçu leur formation à l'étranger. Certains enseignent
à la fois dans des Universités étrangères qui sont
très bien cotées. Pensez-vous que les cours donnés à
Brazza le sont de manière différente qu'en RDC ? Pas du tout mais
les bémols que vous identifiez peuvent être liés aux conditions
de travail différentes, au nombre élevé d'étudiants
à encadrer
etc.
mediacongo.net : Plus récemment, les professeurs d'Université
ont décidé de reprendre le travail après plusieurs semaines
de grèves. Pensez-vous que la qualité de l'enseignement risque
de pâtir du fait de ces interruptions récurrentes et prolongées
?
Maître Bakandeja : Non, sincèrement, je ne le pense pas.
Pour moi, la qualité de l'enseignement n'est pas liée au nombre
de mois de cours mais plutôt au contenu des matières. Un cours
annuel peut très bien être dispensé en un mois et tout dépendra
alors du temps imparti aux élèves pour suivre les TP (ndlr : Travaux
Pratiques) ou encore pour consulter des ouvrages à la bibliothèque.
Cette année, c'est le système de modules qui est appliqué.
Par exemple, pour ma faculté, plusieurs cours sont terminés en
L2 ,G1 et G2.
mediacongo.net : Enfin, que répondez-vous à ceux qui disent
que les professeurs sont davantage des politiciens voire des hommes d'affaires
?
Maître Bakandeja : Il faut toujours se renseigner et ne pas tomber
dans la critique facile. Critiquer aveuglément ceux qui vous ont formés,
c'est se remettre soi-même en cause. Lorsque l'on se dit " compétent
", il faut reconnaître que l'on a été formé
quelque part par des enseignants qualifiés.
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