Culture
« Kuzikiliza », le premier spectacle très politique de Pitcho le rappeur, est une réussite, pleine d’inventivité.
"Kuzikiliza" ("Se faire entendre" en swahili), présenté au KVS à Bruxelles est une belle réussite. Ceux -nombreux- qui apprécient Pitcho Womba Konga, le rappeur aux textes forts, peuvent être surpris. Ce n’est pas un récital Pitcho mais une vraie pièce, inventive, forte, politique et poétique sur le malaise de l’homme noir et les blessures laissées par la colonisation. Un spectacle qui s’achève par une ode à la fraternité humaine.
Trois temps forts peuvent le résumer. Le début où de manière très symbolique un acteur blanc, l’excellent Hollandais Joost Masskant, joue le rôle -le sien- d’un acteur venu en audition devant son metteur en scène, Pitcho. Situation où cette fois, c’est le Noir qui décide de l’avenir du Banc. Pitcho annonce ainsi qu’il réécrira la page tragique de l’histoire de Belgique (le meurtre de Lumumba) vue à travers les yeux d’un Belge d’origine congolaise.
Au milieu de la pièce, on entend une belle complainte congolaise où le chanteur se demande d’où vient alors l’homme noir, puisque Dieu, Jésus, la Vierge, tous les saints, tous sont des Blancs.
Et la fin du spectacle est magnifique quand les trois acteurs -un danseur de breakdance (Karim Kalonji), l’acteur hollandais spécialiste par ailleurs du beatbox, musique avec la bouche et Pitcho lui-même pour le texte en rap et slam- interprètent en langue des signes le discours de Lumumba le jour de l’indépendance en 1960. On voit défiler sur l’écran et on entend la voix même de Lumumba dans le final de son discours, grande ode à la réconciliation, à l’humanité, aux lois justes. Arrivent alors sur scène pour accompagner les trois acteurs/performeurs, des filles de toutes les couleurs de peau et de religion.
Le public sollicité
Sous des dehors poétiques et souvent très drôles et rythmés par le hip-hop, le sujet est aussi impitoyable. Pitcho rappelle les millions de mains coupées et de morts dus à l’exploitation du sol congolais. Il reprend les dénonciations faites par Lumumba et montre sa mort devant un arbre du Katanga, avec la disparition du cadavre dans un bain d’acide sulfurique ne laissant que deux dents que son bourreau garda en trophée. Il écorne même ces ONG qui s’enrichissent avant d’aider le peuple.
Pitcho multiplie les trouvailles scéniques. Il fait participer le public en une « collecte » fictive dans la tradition du rap. Il invente une langue mixte entre français, flamand et anglais. Il fait apparaître des phrases sur les tee-shirts enfilés l’un sur l’autre du danseur ou sur les planches relevées du parquet, évoquant le rôle de Jean Van Lierde, le grand pacifiste, auprès de Lumumba.
Lui-même se grime en Congolais « évolué » de 1960, en Kasavubu singeant l’homme blanc et désemparé quand celui-ci s’en va.
Si Pitcho a une grande présence sur scène, l’acteur et le danseur ne sont pas en reste. Karim Kalonji ne cherche pas à éblouir par des exercices virtuoses de break dance, privilégiant la danse d’un corps comme torturé par les remous politiques.
Kuzikiliza est un beau début pour Pitcho comme metteur en scène de théâtre.
Encore le 23 novembre, au Monty à Anvers.
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