Recherche
  Home Actualités Petites annonces Offres d’emploi Appels d’offres Publireportages C'est vous qui le dites Medias & tendances Immobilier Recherche Contact



Infos congo - Actualités Congo - Premier-BET - 02 mai 2024
mediacongo
Retour

Politique

RDC: le scandale des hommes politiques congolais morts en exil

2018-03-10
10.03.2018
2018-03-10
Ajouter aux favoris
http://www.mediacongo.net/dpics/filesmanager/actualite/2018_actu/03-mars/05-11/tshisekedi-funerailles-service-religieux.jpg -

Depuis les indépendances, aucun des hommes qui ont marqué la vie politique de la RDC n’a pu trouvé de repos sur sa terre natale si ce n’est deux exceptions : Joseph Kasa-Vubu et Laurent Désiré Kabila

Au-delà du cas de l'opposant historique Étienne Tshisekedi, décédé il y a plus d'un an maintenant et dont le corps est toujours en Belgique, force est de constater que les autorités politiques ont, depuis plusieurs générations, un problème avec les leaders politiques de leur pays.

Cela fait plus d’un an qu’Étienne Tshisekedi est mort en Belgique et son corps n’a toujours pas été rapatrié en République démocratique du Congo (RDC). Celui qui faisait figure d’opposant depuis plus de 40 ans a été et demeure populaire en RDC, il est le « Sphinx de Limete », l’un des artisans des accords de la Saint-Sylvestre en décembre 2016 qui aurait pu sortir la RDC de l’impasse politique dans laquelle elle se trouve actuellement.

Force est de constater que les autorités politiques congolaises ont, depuis plusieurs générations, un problème avec le corps des leaders politiques de leur pays.

Pourquoi un tel acharnement à ne pas offrir à ceux qui ont combattu pour leurs idées politiques une sépulture décente sur leur terre natale ?

Le lien entre le corps et le pouvoir

Comme pour Tshisekedi, le corps du défunt Maréchal Mobutu attend toujours son rapatriement du Maroc. (© Getty Images)

Aucun des corps des principaux leaders après les indépendances n’a reçu les rites du viatique qui permettent, dans la tradition africaine, la mise en route du mort vers le village des ancêtres. Et pourtant, la mort d’un adulte protecteur, et a fortiori charismatique, est perçue comme une perte grave qui bouleverse l’équilibre des survivants.

De plus, en Afrique centrale les populations perçoivent un lien direct entre le corps et le pouvoir, le corps étant le lieu privilégié de la puissance qui transcende la mort et le démembrement. Là où la langue française est pauvre et convoque toujours le corps, ou au mieux le cadavre, les langues bantoues ont de multiples termes par exemple : en lingala nzoto pour le corps vivant, ebembe pour le cadavre qui devient lilaka en tant qu’ancêtre.

Des talents spéciaux venus du « monde des esprits » sont présents dans le ventre, en tant que substance magique. Cette substance existe en tous, mais sa taille et sa force grandissent en fonction des compétences de la personne. Les plus forts peuvent la dominer et la façonner à leur bénéfice mais aussi pour le bien commun : c’est ce que font les « grands hommes ».

Cette entité décrite souvent comme un petit animal n’est pas attachée à une personne : elle peut entrer dans un corps ou le quitter, survivre à la mort et migrer du cadavre, c’est là que les spécialistes la capturent sur les tombes des défunts. Le traitement des corps des leaders était donc, d’un point de vue endogène, très important.

« Premières funérailles », la gestion urgente du corps

Le site de l'assassinat de Lumumba à Shilatembo (Haut-Ktanga) est seuement en cours d'aménagement bien des années après sa disparition. (© Radio Okapi/Jean Ngandu)

Il y a eu ceux qui ont été assassinés comme Patrice Lumumba, premier ministre de la jeune République du Congo dont le corps a été dissous dans la soude en janvier 1961 ; Pierre Mulele, l’artisan de la résistance « Simba » face aux pouvoirs de transition qui conduisent à la prise de pouvoir par Mobutu, dont le corps aurait été découpé et jeté dans le fleuve Congo, le 2 octobre 1968.

Il n’existe aucune sépulture, aucun lieu de recueillement pour les proches et ceux qui voudraient rendre hommage à ces hommes de courage. Alors que les « premières funérailles » reposent sur la gestion du cadavre, objet inanimé dont l’identité est encore néanmoins présente, il est perçu comme dangereux et polluant et doit être ritualisé. Ainsi, la toilette mortuaire doit être faite par les femmes les plus âgées et à l’abri des regards. Le corps doit aussi être maquillé avant d’être exposé à la communauté.

Ces rites propitiatoires répandus selon un modèle relativement uniforme en Afrique subsaharienne, mis en place pour s’attirer les bonnes grâces des défunts, relèvent de la mise en place du culte des ancêtres. Sans cette cérémonie, les liens entre les morts défunts et les vivants sont brisés, ainsi que toute possibilité de réincarnation, réactualisation dans un nouveau-né ou résurrection pour les chrétiens africains.

« Secondes funérailles », la normalisation entre morts et vivants

La statue du président Kasa-Vubu, à la place qui porte le même nom. (© destinationkinshasa)

Viennent ensuite « les secondes funérailles » qui permettent de normaliser les relations entre les morts et les vivants et sont jouées dans la célébration et la joie. Les défunts devenus ancêtres protègent les vivants et leur apportent bonheur et prospérité ; a contrario, ils peuvent aussi les punir en leur infligeant malheurs et maladies. Ils ne cessent de transmettre des messages, notamment à travers les rêves dont la teneur sert à rappeler les règles de la tradition que les vivants doivent respecter.

S’ils se sentent négligés, les ancêtres hantent les vivants, ils peuvent même les « posséder » en faisant irruption dans leur corps. Refuser aux proches des leaders assassinés les rites sur leurs corps ainsi qu’une sépulture décente sur la terre de leurs ancêtres revient à rompre l’harmonie et le cercle de la vie, à placer les descendants sous l’œil de « spectres errants »

Exceptions et arrière-pensées politiques

Depuis les indépendances, aucun des hommes qui ont marqué la vie politique de la RDC n’a pu trouvé de repos sur sa terre natale si ce n’est deux exceptions : Joseph Kasa-Vubu (mort en 1969) et Laurent Désiré Kabila (assassiné en 2001).

Dans une perspective nationale et historique, il y a aussi les corps des leaders qui ont joué le jeu des grandes puissances et des grandes sociétés minières ou diamantifères comme Moise Tshombe, leader de la sécession au Katanga dès juillet 1961, mort en exil et enterré en toute discrétion au cimetière d’Etterbeek en Belgique. Ou encore celui de Mobutu qui a régné sur la RDC de 1965 à 1997, et dont le mausolée se trouve au cimetière européen de Rabat au Maroc.

Depuis plusieurs années, le gouvernement congolais promet aux familles de rapatrier les corps de ces hommes/en vain… Même s’ils n’incarnent pas les heures les plus glorieuses de l’histoire du Congo, ils en sont des figures nationales.

Finalement, depuis les indépendances, aucun des hommes qui ont marqué la vie politique n’a pu trouvé de repos sur sa terre natale si ce n’est deux exceptions : Joseph Kasa-Vubu (mort en 1969) et Laurent Désiré Kabila (assassiné en 2001).

Joseph Kasa-Vubu, premier Président congolais, est enterré à Singini dans le Bas-Congo. Son mausolée a été réalisé en 2006, 37 ans après sa mort, avec de chaque côté de l’entrée principale un escargot transpercé d’une épée, symbole du pouvoir détenu par le parti du défunt (ABAKO). Laurent Désiré Kabila, vainqueur de la rébellion contre Mobutu, opposant historique, repose en son mausolée érigé devant le palais de la Nation, juste un an après sa mort, le 16 janvier 2001.

Point commun à ces deux exceptions : Joseph Kabila, le président le RDC qui ne l’est plus officiellement depuis le 19 décembre 2016 a autorisé ces deux constructions à des fins politiques et mémorielles. Il s’agissait de renforcer son ancrage à la présidence en s’inscrivant dans le sillage de Kasa Vubu, en faisant mine d’oublier que l’homme-phare de la décolonisation reste Patrice Lumumba. Et aussi de renforcer sa filiation avec le feu Laurent-Désiré Kabila, Président lui aussi assassiné le 16 janvier 2001… Joseph Kasa Vubu et Kabila père seraient donc les deux références autorisées et mobilisables du Président actuel.

Spectres errants et immobilités problématiques

Moise Tshombe, mort en exil et enterré en toute discrétion au cimetière d’Etterbeek en Belgique, retrouvera-t-il un jour la terre de ses ancêtres ? (© Getty Images)

Le problème avec les morts c’est que plus vous voulez les faire disparaître plus ils occupent l’espace et le temps comme des spectres errants qui n’ont pas trouvé le repos : des immobilités problématiques. Pour certains Africains, les malheurs que connaît la RDC s’expliquent par l’outrage fait à certains pères de la Nation.

De timides réhabilitations sont visibles par le biais de l’érection de statues dans la ville comme celle de Patrice Lumumba en 2001 dans le quartier de Limete, sur une place où la circulation est si dense qu’il est périlleux pour tout piéton d’y accéder. Ou encore cette avenue rebaptisée dans Kinshasa au nom de Pierre Mulele en 2002, mais qui dans la pratique quotidienne des Kinois reste l’avenue du « 24 » (24 novembre, en mémoire du coup d’État de Mobutu survenu en ce jour de 1965), une grande artère passant devant le Camp Kokolo, où Mulele fut torturé et massacré.

L’exécutif au Congo, toujours en quête de légitimité, se sent constamment menacé même par les leaders morts avec lesquels il peine à rivaliser. Les responsables politiques de la RDC ne peuvent pas continuer à enfouir la mémoire des pères de la Nation, leur Histoire et prôner la sélection mémorielle en fonction de leurs propres intérêts. Les Congolais ont besoin de commémorer et de construire ensemble leur Nation pour un avenir dans la paix à laquelle ils ont, comme tout à chacun, droit.

Karine Ramondy
The Conversation / Le Point / MCN, via mediacongo.net
C’est vous qui le dites : 5 commentaires
8709 suivent la conversation

Faites connaissance avec votre « Code MediaCongo »

Le code à 7 caractères (précédé de « @ ») à côté du Nom est le Code MediaCongo de l’utilisateur. Par exemple « Jeanne243 @AB25CDF ». Ce code est unique à chaque utilisateur. Il permet de différencier les utilisateurs.

Poster un commentaire, réagir ?

Les commentaires et réactions sont postés librement, tout en respectant les conditions d’utilisation de la plateforme mediacongo.net. Vous pouvez cliquer sur 2 émojis au maximum.

Merci et excellente expérience sur mediacongo.net, première plateforme congolaise

MediaCongo – Support Utilisateurs


Mampuya @GFNVXBG   Message  - Publié le 11.03.2018 à 16:56
(suite) La CNS , était une grande occasion perdue pour reconcilier le peuple avec son passé post colonial. Malheureusemet elle était devenue une tribune pour un groupe bien connue. Mobutu dans notre histoire était et reste un grand leader. Il n'avait pas esité à convoquer,se faire juger par la CNS et à réclamer des élections. Le jour ou nous comprendrons sa grandeur ,malgré ses erreurs, il est possible que le peuple va réclamer le retour de son pays. Mobutu était obbligé de s'enfuir (affaibli,malade), mais les autres leaders qui les avaient obligés de quitter leur pays?. On mange ce que on a planté, Tshisekedi,Thsombe ecc devaient resté au pays se faire soigné sur place.

Réagir

Répondre
@
Insérez un émoji
Mampuya @GFNVXBG   Message  - Publié le 11.03.2018 à 16:38
Le problème c'est que l'histoire du Congo,pré et post coloniale n'est pas connue, mieux moins connue par les congolais, d'où la jeunesse congolaise manque des points des références certes dans son orientation politique. Notre histoire de pays et de Nation est récente, chargée des problématiques de tout genre,sécessions,rébellions,guérillas , et de marasme politique. D'où le leader d'aujourd'hui peut etre oublié à sa mort le jour après. Celui qui meure à l'extérieur pose problème de répatriement, puisque il n'était pas ce leader national mais tribal, ou regionaliste.

Réagir

Répondre
@
Insérez un émoji
"Justice" ya mboka n @TYE1YEX   Message  - Publié le 10.03.2018 à 13:08
Il est vrai que l'absence de cérémonie,de lieu de mémoire peut être perçue comme une mauvaise chose pour ces hommes qui ont marqué leur pays. Ont-ils marqué la Nation?Je souscris en partie : l'homme-phare de la décolonisation est P Lumumba C'est le fond de la question, politique .D'un point de vue idéologique , certainement,pour marquer une rupture avec le système colonial et construire un projet d'unité nationale Pourtant, historiquement, il ne faudrait pas en déduire que ni l'Abako ni son leader Kasa-vubu ne se sont battus pour l'indépendance bien avant l'action et la mythification de P Lumumba !!Paix à nos grands hommes!!

Réagir

Répondre
@
Insérez un émoji
DARTANIA @TZED9DJ   Message  - Publié le 10.03.2018 à 12:48
le probleme de tshisekedi concerne les voyoux de l'udps pas le gouvernement, il doit être enterré au cimetière comme tout le monde pas chez lui à maison.

Réagir

Répondre
@
Insérez un émoji
ko kimate @OX6O1WR   Message  - Publié le 10.03.2018 à 12:05
Au Congo, il faut revoir beaucoup des choses.

Réagir

Répondre
@
Insérez un émoji
right
Article suivant Le Président de la République promulgue le nouveau Code minier
left
Article précédent Élection en RDC: vers une coalition Bemba-Kamerhe-Muzito ?

Les plus commentés

Afrique "Nous avons demandé : le M23, les membres de ce groupe sont-ils des Rwandais ou des Congolais ? Et la RDC nous a dit : ce sont des Congolais. Fin du débat" (William Ruto)

22.05.2024, 23 commentaires

Politique Augustin Matata Ponyo: « Un coup d’Etat ne vise pas un ancien ministre de l’Economie mais un Président en fonction »

24.05.2024, 12 commentaires

Politique Assemblée nationale : 2 candidats de l'opposition retenus pour l'élection du bureau définitif

22.05.2024, 10 commentaires

Société Christian Malanga n'a aucun lien avec l'Église catholique (CENCO)

22.05.2024, 9 commentaires

Ont commenté cet article



Ils nous font confiance

Infos congo - Actualités Congo - confiance