Monde
Le nouveau président des Seychelles Danny Faure a appelé à l'unité nationale dimanche pour son intronisation, tout en restant sourd aux doléances de l'opposition, qui réclame un scrutin présidentiel après sa victoire historique aux législatives de septembre.
"La nation dans laquelle nous croyons réclame de notre part un rassemblement, afin de surmonter les obstacles et différences qui nous divisent", a déclaré dimanche Danny Faure, appelant au "dialogue" et à "l'unité nationale". A cet égard, Dany Faure s'est dit prêt à travailler avec l'Assemblée nationale, devant laquelle il doit s'exprimer mardi pour expliquer "le travail du gouvernement". Mais le nouveau président n'a à aucun moment suggéré que sa prise de fonction n'a pour vocation que d'assurer une transition dans l'attente d'un nouveau scrutin présidentiel. "Chacun d'entre nous peut interpréter les résultats des élections de manières différentes", a-t-il notamment dit.
Au pouvoir depuis 2004, le président James Michel avait annoncé sa démission à la surprise générale fin septembre à la suite d'un scrutin ayant vu l'opposition obtenir la majorité au Parlement pour la première fois depuis le retour du multipartisme en 1993. Comme le prévoit la Constitution seychelloise, le vice-président Danny Faure a été nommé dimanche en remplacement de James Michel lors d'une cérémonie dimanche en fin d'après-midi au palais présidentiel de Victoria, la capitale de cet archipel de 115 îles vivant principalement du tourisme et de la pêche.
James Michel et Danny Faure, respectivement âgés de 72 et 54 ans, sont issus du même parti, le Lepep ("Le peuple" en créole), ex-parti unique au pouvoir depuis 1977. Or, si Danny Faure entend mener à son terme le mandat de cinq ans obtenu fin 2015 par James Michel, l'opposition, forte de sa nouvelle position au Parlement et du résultat extrêmement serré de la dernière élection présidentielle, réclame du nouveau chef de l'Etat qu'il organise au plus vite un nouveau scrutin présidentiel.
Bras de fer en vue
"Les Seychelles doivent avoir un président qui soit directement élu par le peuple", a récemment argué le chef de file de l'opposition, Wavel Ramkalawan. En décembre 2015, James Michel n'avait été réélu pour un troisième mandat qu'avec 50,15% des suffrages, soit 193 voix de plus que Wavel Ramkalawan. Jamais une présidentielle aux Seychelles ne s'était décidée sur une marge aussi infime, et jamais depuis le retour du multipartisme le candidat du parti Lepep n'avait été poussé à un second tour.
Et lors des législatives de septembre, le Lepep n'a obtenu que 10 sièges de députés, contre 15 à la coalition d'opposition Linyon Demokratik Seselwa ("L'Union démocratique seychelloise"). Depuis, pouvoir et opposition gonflent leurs muscles en vue d'un bras-de-fer qui semble de plus en plus inévitable.
Le 8 octobre, l'opposition a défilé dans les rues de Victoria pour réclamer un nouveau scrutin présidentiel. Le Lepep a répondu une semaine plus tard par une manifestation en soutien à Danny Faure, une première depuis le retour du multipartisme. Dans une harangue préfigurant peut-être le ton de la politique seychelloise pour les prochaines semaines, James Michel s'était adressé le 8 octobre aux membres du parti Lepep: "Ne laissez personnes insulter le parti. S'il faut donner des coups de poing, vous devrez aussi le faire". Le premier réel face à face aura vraisemblablement lieu mardi au Parlement, contrôlé par l'opposition: les observateurs s'attendent à ce que Danny Faure soumette aux députés un nouveau gouvernement, dont un nouveau vice-président.
L'opposition n'a pas encore communiqué sur le sujet, mais au vu de ses récentes sorties, il est difficile d'imaginer qu'elle donne sa bénédiction au nouveau président. Un tel cas de figure provoquerait un blocage inédit sur l'archipel, qui se retrouverait alors sans vice-président et affublé d'un président empêché de nommer de nouveaux ministres (l'équipe de M. Michel resterait en poste).
Selon Wavel Ramkalawan, "il y a de l'abus dans notre Constitution et ce que nous demandons, c'est que la disposition 55.1 (de la Constitution) soit amendée pour que l'on ne puisse plus passer le pouvoir à une autre personne". En 2004, James Michel avait accédé au pouvoir suite à la démission de France Albert René avant la fin de son mandat.
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