Monde
Pour les signataires de l'accord avec l'Iran, c'est la consternation. Téhéran dénonce la décision américaine, accusant Donald Trump de pratiquer la guerre psychologique mais le président Hassan Rohani se dit prêt à maintenir le dialogue avec les Européens, les Russes et les Chinois en vue de maintenir l'accord. Quelle est désormais la marge de manoeuvre des Européens ?
Les vingt-huit pays de l’Union européenne vont maintenant tenter de sauver les meubles de l’accord nucléaire avec l’Iran. Leur espoir, c’est que Téhéran accepte de maintenir les engagements pris, faire en quelque sorte comme si Donald Trump n’existait pas.
La crainte des Européens est double : il y a d’abord le risque, bien réel, d’un embrasement de l’ensemble du monde arabo-musulman, d'autant que ce mercredi matin les camps rivaux sont bien identifiés et, pour partie au moins, pressés d’en découdre.
Et le chaos de l’autre côté de la Méditerranée provoquerait inévitablement un accroissement du flux de réfugiés, cherchant à rejoindre l’Europe. Une Europe toujours dépourvue d’une politique d’asile et de répartition commune.
Mais, pour les Européens, le souci immédiat, ce sont les conséquences, pour leurs économies, de sanctions américaines à large spectre, qui donneraient aux entreprises européennes à choisir entre commercer avec l’Iran ou commercer avec les États-Unis.
« La marge de manœuvre de l’Union européenne est assez réduite, confirme Vincent Eiffling, chercheur à l'Université de Louvain en Belgique, outre le fait que l’Union européenne pourrait mettre en place des contre-mesures qui viendraient contrebalancer la décision d’établir des sanctions extraterritoriales américaines, ce qui conduirait finalement l’Europe à s’engager dans une espèce de guerre politico-commerciale avec les Etats-Unis ».
Les entreprises françaises présentes en Iran ont beaucoup à perdre
Premier concerné, Total qui, l'an dernier, profitant de l'accalmie diplomatique, signait un accord avec Téhéran pour le développement de South Pars, le plus important gisement de gaz naturel au monde. Un investissement d'un milliard de dollars. Mais le groupe pétrolier a prévenu, le désengagement est possible. Certaines parts du projet pourraient être revendues à un concurrent chinois.
Potentiellement exposé également, Airbus, à qui Iran Air, la compagnie nationale, a commandé une centaine d'appareils. Comme son rival américain Boeing, le constructeur aéronautique basé à Toulouse, joue ici plusieurs milliards de dollars.
Dans le domaine de l'automobile, les partenaires historiques de l'Iran sont Renault, depuis 15 ans, et PSA. Lorsque les sanctions ont été levées, ils ont signé de nouveaux accords avec des constructeurs locaux. Un marché très prometteur.
D'autres entreprises françaises étaient déjà dans l'attente. Bouygues et Aéroports de Paris ont renoncé l'an dernier à construire et exploiter l'aéroport Khomeyni de Téhéran. Trop faible soutien des banques.
Prudence enfin chez Vinci, candidat à la gestion des aéroports de Mashhad et Ispahan. Les discussions ne sont pas finalisées, prévient le groupe de BTP qui précise qu'elles se sont toujours inscrites dans le respect des règles du droit international.
L’action diplomatique future de l’Union européenne ne se présente donc pas sous les meilleurs auspices. « On voit mal ce que l’Union européenne pourrait faire. Elle pourrait proposer un nouveau chapitre sur le programme balistique ou des négociations sur la politique régionale de l’Iran. Mais ce sont des dossiers qui constituent des lignes rouges pour Téhéran et je vois très, très mal la République islamique accepter de négocier sur ces questions-là », conclut également Vincent Eiffling.
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