Kinshasa : la précarité des pêcheurs, risque pour les écosystèmes

La cité de Kinkole est située dans la commune de la N’sele, est de Kinshasa. Construite par le Président Mobutu pour les pêcheurs en vue de promouvoir la gestion durable des ressources halieutiques, un tour dans cette cité laisse sans mot face à la précarité dans laquelle évoluent les pêcheurs.

La cité des pêcheurs reflète une réalité toute autre, transformée en un lieu de détente où pullulent les resto-bars avec comme menu phare « poissons frais braisés ». Les pêcheurs, plutôt que de nourrir toute une nation à défaut de l’exportation de la diversité halieutique du milieu, en sont réduits à une pêche de « proximité » pour ne fut-ce que gagner de quoi nourrir la famille.

Difficultés

Abandonnés à leur triste sort, ils essaient tant bien que mal à s’organiser afin de ne tirer que profit du minimum de leur art. Privés de chambres froides adaptées pour la conservation des poissons, ceux qui ne peuvent écouler leurs marchandises le même jour s’adonnent au fumage pour conserver les produits.

Le manque de magasins d’intrants de pêche (hameçons, filets, etc.) ne facilite guère le travail. Ceci pousse certains pêcheurs à adopter la moustiquaire imprégnée dont l’usage pourtant fortement déconseillé, suite à sa capture abusive des petits poissons (bébé poisson), réduit à long terme la reproduction des poissons ainsi que d’autres ressources halieutiques, relate certains pêcheurs.

Danger sur les écosystèmes

A l’exception de quelques pêcheurs âgés, les jeunes, pour la plupart, ignorent quasiment le code de la pêche et même la date du 24 juin, journée nationale du poisson, qui leur est dédiée.

Luc et Bokoyo, tous jeunes pêcheurs des Milékés à Kinkole ont répondu affirme à Media Congo Press n’avoir jamais entendu parler du code de la pêche en RDC : « On se contente de pêcher pour subvenir à nos besoins, quant au code de la pêche, on ne saurait en dire plus puisqu’on n’en a jamais entendu parler », disent-ils.

De son côté, Monsieur Bonyoma, l’un des doyens du site, incombe l’ignorance des jeunes pêcheurs au Ministère de l'Agriculture, Pêche & Elevage (Ministère de tutelle, MAPE) qui d’après lui ne mènent pas à bien la mission leur confiée : « Depuis le décès de Monsieur Mandvil, nous sommes abandonnés à notre triste sort, aucune structure de pêche ne fonctionne convenablement. Le Cenadep se contente de distribuer des boules de nylon, balance et hameçons uniquement le 24 juin de chaque année à quelques pêcheurs affiliés à des associations dont je juge inactives voire virtuelles », lâche-t-il.

« De nationalité française, Mandvil était gestionnaire et superviseur du site des pêches qui s’est suicidé en 1975, en se jetant dans le fleuve, par peur des représailles, après avoir détourné les fonds que le Maréchal Mobutu avait disposés pour le bon fonctionnement du site halieutique de Kinkole », rappelle Monsieur Bonyoma.

Selon lui, l’inaction du MAPE face à la formation et encadrement des jeunes pêcheurs accouche l’ignorance dont font preuve les jeunes pêcheurs. Sur ce, Monsieur Bonyoma interpelle le Ministère de Pêche et Elevage au renforcement des capacités et connaissances des techniques de pêche.

La connaissance du code de la pêche en RDC est primordiale, martèle-t-il : « Les jeunes, victimes de manque d’encadrement pêchent abusivement et ne respectent même pas le repos biologique des poissons. »

L’ignorance du code de la pêche conduit au non-respect du repos biologique ; source de dégradation de certains écosystèmes en République démocratique du Congo.