Culture
Enfin ! La première chaire permanente consacrée à l'histoire ancienne du continent africain intitulée « Histoire et archéologie des mondes africains » est inaugurée ce jeudi 3 octobre par l'historien et archéologue François-Xavier Fauvelle.
Pour la première fois, le Collège de France va avoir sa chaire permanente d'« Histoire et d'archéologie des mondes africains ». Elle a été confiée à l'historien et archéologue François-Xavier Fauvelle, élu en novembre dernier au sein de l'institution de la place Marcelin-Berthelot. À 51 ans et après avoir parcouru de nombreux terrains sur tout le continent, ce directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS), auteur du Rhinocéros d'or (éditions Alma), co-directeur de L'Afrique ancienne, de l'Acacus au Zimbabwe, 20 000 avant notre ère – XVIIe siècle, chez Belin, est un spécialiste reconnu de l'histoire ancienne de l'Afrique. Au cœur de la leçon inaugurale qu'il prononcera ce jeudi 3 octobre devant un parterre de chercheurs, journalistes et du grand public : faire entrer l'Afrique dans les savoirs communs. Comment, bien avant l'arrivée des Occidentaux, les sociétés africaines ont exercé leur rayonnement ? À partir de quelles sources reconstituer ? Qu'en est-il de la recherche archéologique aujourd'hui en Afrique et de ses rapports à l'histoire ? Comment dialoguent ces deux disciplines ? Quelles sont les pistes envisageables pour ouvrir de nouveaux champs de recherche qui seraient aussi bien orientés par les historiens que par les archéologues ? Autant de thèmes et de questions qui seront abordés au fil des leçons préparées par François-Xavier Fauvelle.
Lutter contre les préjugés d'une Afrique sans « histoire »
« Il y a un manque d'Afrique », François-Xavier Fauvelle le répète à longueur d'interviews, à la radio, à la télévision, dans la presse écrite. Car le point de départ de cette nouvelle chaire, c'est un manque. « C'est vrai en France, en Europe, aux États-Unis, mais aussi en Afrique », qui s'en est longtemps désintéressée, ce qui explique, analyse François-Xavier Fauvelle pour l'AFP, le choix, qui en a fait tiquer certains, d'un Français et non d'un Africain à ce poste. « Sur l'histoire ancienne de l'Afrique, il y a beaucoup moins de collègues africains qu'il y en a en Europe. Il y a un désinvestissement des pouvoirs publics, très peu de filières doctorales, peu de pays sont capables de recruter deux ou trois archéologues par an. »
Mais ce « déni d'histoire » va beaucoup plus loin. Souvenez-vous à Dakar, en 2007, lorsque le président français d'alors Nicolas Sarkozy fit scandale en assénant que « l'homme africain n'est pas assez entré dans l'Histoire ». Une hérésie que François-Xavier Fauvelle, fort de ses années d'études et de fouilles archéologiques sur le continent africain, veut combattre. Comment l'expliquer ? « La traite des esclaves en particulier, suivie de la colonisation, nous ont habitués à percevoir que l'homme africain – pour utiliser cette expression de Sarkozy – était uniquement utile par sa valeur marchande ou sa valeur de travail, mais certainement pas le produit d'une trajectoire historique », analyse François-Xavier Fauvelle à l'AFP.
Faire entrer l'Afrique dans les savoirs communs
Instruit par des années d'études et de fouilles archéologiques – notamment sur les sultanats islamiques de l'époque médiévale en Éthiopie ou le site de la ville marocaine de Sijilmäsa, l'une des portes du Sahara – l'historien ne minimise pas les défis. Au premier chef, des indices épars et hétérogènes : documents écrits – avec par exemple divers systèmes d'écriture tout au long de la vallée du Nil, de l'Égypte jusqu'au Soudan -, récits de voyageurs grecs ou arabes, mais aussi des inscriptions, des pièces archéologiques, des sources orales... L'historien est formel : « Des sites historiques majeurs restent encore à découvrir, à l'instar de plusieurs capitales de royaumes médiévaux mentionnées par des sources arabes ou de villes antiques citées par des voyageurs grecs le long des côtes africaines de l'océan Indien. » Son sujet d'étude est tout aussi détonnant et ambitieux puisqu'il porte sur le sujet assez méconnu des « royaumes, cette forme sociale très particulière qu'est le nomadisme pastoral, l'exceptionnelle variété linguistique ».
Soulever les défis de la recherche contemporaine
D'autant que « l'Afrique est un continent géographique, mais c'est plusieurs continents d'histoire, qui évoluent dans le temps et sont connectés les uns aux autres. Et connectés avec les mondes non africains. Dès le XIIe siècle, on trouve des porcelaines importées de Chine à Madagascar ou encore à Mapungubwe, le fameux site sudafricain du rhinocéros d'or. On a trouvé aussi dans un monastère éthiopien des monnaies kushanes, un empire gréco-bouddhiste d'Afghanistan au début de l'ère chrétienne. Toutes ces découvertes témoignent d'échanges commerciaux dans lesquels des Africains jouaient bien évidemment un rôle, imposant leurs goûts et négociant les termes de l'échange », explique l'historien sur le site du Collège de France qui compilera les leçons du professeur, en textes et vidéos accessibles à tous. « Ça dessine quelque chose, mais on ne sait pas très bien quoi. » « Il faut accepter d'avoir des creux et des pleins (...) On peut quand même raconter des choses, mais pas de la même façon que l'histoire de la France du Moyen Âge », confie l'auteur du Rhinocéros d'or. Histoires du Moyen Âge africain (Alma).
« Les sociétés africaines ont été confrontées, bien plus que d'autres, à un environnement contraignant qui a été la source d'une inventivité unique. Que celle-ci soit politique, technique, religieuse, linguistique ou artistique. » Son principal regret est l'absence ou le silence d'organismes de recherche, de fouilles préventives, de formations universitaires. En outre, l'archéologue regrette que, pour les grands bailleurs de fonds de la recherche, l'Afrique ne soit pas une priorité.
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