Science & env.
Le 4 mai, un communiqué de l’armée congolaise accusait une section rurale du mouvement citoyen Lucha (Lutte pour le changement) d’être de « connivence » avec des groupes armés. Dès le lendemain, la cellule de communication nationale de la Lucha répondait par communiqué en attaquant… les dirigeants du parc des Virunga.
Le communiqué de l’armée congolaise, signé par le général Willy Yamaba Kabangu, commandant de secteur ad interim de l’opération Sokola II, assurait que la section Lucha de Nyamilima (groupement de Binza) était « en connivence avec les groupes armés ».
Dès le lendemain, la Lucha prenait la défense de sa section de Nyamilima, assurant que l’accusation était dénuée de tout fondement et estimant que pour avoir « su insuffler une dynamique non violente dans cette région » en proie aux violences depuis quelque 25 ans, sa présence « devrait être encouragée par les autorités locales et provinciales » plutôt que « combattue et vilipendée ».
Selon le communiqué de Lucha, sa section de Nyamilima fait l’objet « d’une forte répression depuis plusieurs semaines en raison de [sa] mobilisation pour les droits des populations locales » au moyen de deux sit-in et d’une « marche pacifique » auxquelles « la population a largement participé » pour réclamer « une démarcation participative du parc des Virunga ». Il s’agit, en clair, que la population ait son mot à dire pour fixer les limites du parc.
Le parc confronté à une forte poussée démographique
Ce dernier, vieux de près d’un siècle – il a été créé en 1925 – est en butte depuis des decennies aux tentatives des populations locales d’empiéter sur son territoire pour étendre leurs champs et leur habitat dans des zones qui leur semblent inexploitées. En cause : l’accroissement naturel de la population, une forte migration venue du Rwanda – en particulier lors de la fuite des partisans du génocide de 1994 – la perte de contrôle de l’Etat congolais sur son territoire en raison de son affaiblissement.
Une étude de 2010 du WWF (World Wildlife Fund), partenaire du parc des Virunga pour sa réhabilitation, sur fonds européens, ajoute les nombreuses modifications officielles du parc jusqu’en 1950, la disparition de nombreuses bornes – volontaire ou involontaire – et « quelques accords officieux entre certains anciens conservateurs et la population, pendant la période difficile, pour suppléer à l’absence de salaires de l’Etat ».
Selon Lucha, cependant, l’ICCN (Institut congolais pour la conservation de la nature), qui a autorité sur le parc, en a « élargi » la superficie au fil du temps. En réponse à une demande de La Libre Afrique.be, le directeur des relations extérieures du parc, Me Joël Wengamulay, a cependant diffusé une analyse d’images satellites indiquant une progression de l’espace agricole et évaluant à 18,4 % les surfaces du parc ayant été envahies, dont 3 % depuis moins d’un an.
Démarquer les limites du parc par une clôture
En 2004, l’ICCN a lancé un processus de « démarcation participative ». Dans l’entendement des défenseurs du parc, il ne s’agit cependant pas de négocier de nouvelles limites à ce dernier avec les populations environnantes, mais de les faire participer à la reconnaissance de ses limites légales, fixées par l’Etat congolais (bornes existantes, images satellitaires, etc.). La construction d’une clôture électrique, lancée en 2019, est aujourd’hui dans la zone de Nyamilima où ce travail s’est heurté à l’opposition de populations dont les champs sont ainsi à l’intérieur des limites du parc.
Selon Lucha, le ministre provincial de l’Environnement a suspendu la construction de la clôture mais l’ICCN « a refusé d’obtempérer ». Dans une note tehnique de mai 2020 envoyée à La Libre Afrique.be, l’ICCN indique de son côté que « dans les années 1995-2000 », à Nyamilima, la limite des champs « coïncide bien avec la limite légale ». C’est aussi le cas à Kiseguro. Mais ce n’est plus le cas aujourd’hui. Et de souligner qu’à Kiseguro, « toutes les pancartes » marquant les limites du parc « fixées en 2006 ont été arrachées par les agriculteurs ».
L’ICCN a autorisé les populations dont les champs se retrouvent à l’intérieur des clôtures du parc à venir récolter mais refuse toute nouvelle culture. Lucha le reconnaît, mais assure que les conditions fixées pour ces récoltes par l’ICCN sont « impossibles », telle, estiment les activistes, l’obligation de pénétrer dans le parc par une seule entrée, alors que « des milliers » de paysans seraient concernés.
A certains endroits, la cloture a été attaquée, mais la Lucha réfute toute responsabilité. Elle réclame des compensations pour « les droits fonciers perdus par les populations » de Nyamilima et demande « un dialogue sincère entre les populations locales, ICCN et le gouvernement afin de trouver des solutions ».
Promesses de droits de propriété
De son côté, dans sa note de mai 2020, l’ICCN stigmatise « certains politiciens » qui ont « manipulé » les communautés locales en leur promettant de plaider pour que les paysans soient reconnus propriétaires des terres du parc envahies. Et il recommande « que les communautés locales cessent de s’associer aux groupes armés pour se venger contre les écogardes de l’ICCN, qui ne font que faire respecter la loi ».
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