Politique
La mobilisation contre le président Joseph Kabila a été fermement contenue mercredi en République démocratique du Congo, à la grande satisfaction des autorités, de nouveau interpellées par les Nations unies sur le respect de la liberté d'expression.
Aucun incident majeur n’a marqué cette première journée de mobilisation contre le calendrier électoral qui fixe les prochaines élections au 23 décembre 2018. Les organisateurs opposition et mouvements citoyens exigent le départ du président Joseph Kabila dès la fin de cette année.
Un « délinquant » a été blessé par balles à Kinshasa et dix-neuf manifestants ont été arrêtés à Goma (6), Lubumbashi (7) et Matadi (6), a affirmé le colonel Pierre-Rombaut Mwanamputu, porte-parole de la police nationale dans un communiqué. Le texte mentionne des incidents isolés (pneus brûlés, bus incendié…) dans plusieurs villes et salue « la maturité » des Congolais « qui n’ont pas répondu à cet appel à manifester visant la déstabilisation des institutions ».
Le colonel Ezéchiel-Pierrot Mwanampuntu a confirmé l’interpellation à Kinshasa d’un élément de la police, qui a blessé par balle un bandit communément appelé "Kuluna" qui agressait un citoyen.
«Des barricades enflammées et pneus brûlés ont été posés à Kabulameshi, à Kasenga, à Kasapa et au marché central de la Kenya [Lubumbashi]. Lorsqu’on va au Kongo-Central, à Matadi, on nous signale qu’il y a une quiétude qui a été observée », a-t-il rapporté.
Un groupe de motards, qui tentaient de jeter des tracts devant la mairie de Kindu au Maniema, « ont été pris en charge par la police.»
La Majorité présidentielle qui soutient Joseph Kabila a aussi salué « la grande maturité du peuple congolais » face à la « mauvaise foi et la supercherie de ces démocrates de façade ».
Une quarantaine de manifestants ont été arrêtés dans l’est du pays, avait pour sa part indiqué le mouvement citoyen Lutte pour le changement (Lucha), à l’origine de cette journée soutenue par le Rassemblement de l’opposition.
«La ville morte à complètement réussi et les manifestations populaires [l’ont été] à 60% », a affirmé Espoir Ngalukiye, activiste au sein du Collectif d’action de la société civile et militant de la Lucha, précisant que l’appel été suivi dans presque toutes les grandes villes du pays.
Cependant, «nous déplorons quelques violences occasionnées par la brutalité et le non-professionnalisme de la police nationale congolaise. Peut-être, elle est devenue politique ou partisane ; pourtant elle est censée travailler avec la population et pour la population », a-t-il regretté.
Une police congolaise « sans pitié »
Les forces de sécurité avaient prévenu qu’elles se montreraient inflexibles. « Tout attroupement de plus de cinq personnes sera dispersé », a averti le chef de la police de Kinshasa Sylvano Kasongo. « Sans pitié », aurait-il ajouté d’après plusieurs médias.
« Les commentaires incendiaires des autorités de police avant les manifestations d’aujourd’hui sont extrêmement alarmants », a réagi le Haut commissaire aux droits de l’homme des Nations unies, Zeid Ra’ad Al Hussein. « J’appelle le gouvernement et les forces de sécurité à œuvrer pour désamorcer les tensions au lieu de créer les conditions favorisant la répression, la confrontation et la violence ».
Le Haut commissaire a appelé Kinshasa au « respect des droits à la liberté de réunion pacifique, d’association et d’expression », tout comme la Mission des Nations unies en RDC (Monusco) la veille.
Kinshasa, une ville (presque) morte
Sur le terrain, l’appel s’est traduit dans la capitale Kinshasa non par des manifestations, mais par une activité moins dense que d’habitude. La circulation était dans l’après-midi plus fluide qu’un jour de semaine ordinaire sur les grands boulevards 30-Juin et Lumumba, alors que la vie paraissait normale dans les quartiers. La présence des forces de sécurité était discrète.
Dans la capitale économique Lubumbashi (sud-est), la police a enregistré quelques incidents (barricades et pneus brûlés, bus incendié…). « Mon magasin est fermé, pas pour suivre le mot d’ordre des politiciens mais j’ai peur des pillages », a déclaré à l’AFP un commerçant.
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