Politique
Sur le plan de la mobilisation, l’opposition a réussi, samedi [29 septembre 2018] après midi, à mobiliser sans incidents plusieurs milliers de personnes à Kinshasa. La défiance à l’égard des prochaines élections, toujours prévues pour le 23 décembre prochain, était générale. Les opposants ont rappelé leurs principaux griefs : une « machine à voter » contestée, un fichier électoral peu fiable, une Cour constitutionnelle qui serait « aux ordres ». Au-delà de ces griefs connus et largement partagés, et si l’on se rappelle que deux « poids lourds » Jean-Pierre Bemba et Moïse Katumbi sont empêchés de se présenter, la seule question qui importe est celle de l’unité de l’opposition autour d’un candidat commun, rendue obligatoire par le scrutin à un tour.
Le meeting de samedi a réussi à rassembler Félix Tshisekedi, le leader de l’UDPS, Vital Kamerhe ancien président de l’Assemblée nationale et leader de l’Union pour la nation congolaise, Martin Fayulu du parti ECIDE, l’ancien premier ministre Muzito en rupture avec le parti lumumbiste et recalé par la Cour constitutionnelle. Des messages des « invalidés » Bemba et Katumbi ont été lus, incitant à la fermeté. Cependant, aucun désistement en faveur d’un candidat unique n’a encore été annoncé. Cependant, l’idée d’un appel au boycott du scrutin fait son chemin. Mais elle n’a pas encore rallé tous les candidats surtout ceux qui, comme Félix Tshisekedi, croient encore avoir une chance de l’emporter contre Emmanuel Shadary, le dauphin de Kabila. Faut-il dire aussi que, parmi les ténors de l’opposition, la méfiance demeure extrême : certains ont déjà travaillé avec Kabila, d’autres ont négocié secrètement avec le pouvoir et tous soupçonnent leurs rivaux d’éventuels coups fourrés, comme, par exemple, participer à un gouvernement dit d’« union nationale » qui gérerait un nouveau délai obtenu par consensus, une manœuvre qui permettrait au rusé Kabila d’encore gagner du temps… Lié à l’évolution de la situation politique, l’autre terrain sur lequel se joue l’avenir du Congo est le domaine sécuritaire.
La révolte dite des Kamwena Nsapu dans le Kasaï, une lutte pour le pouvoir coutumier qui avait embrasé quatre provinces et fait plus de 3000 morts et 1,4 million de déplacés semble sous contrôle, à l’issue d’une répression implacable, mais le feu pourrait reprendre. Par contre, à Beni, dans le Nord-Kivu, la situation ne cesse d’empirer : des attaques attribuées au groupe ougandais ADF Nalu (de confession musulmane) ont fait plus de 20 morts le week-end dernier et l’impuissance de la Monusco et de l’armée congolaise a été démontrée une fois de plus.
Alors que des attaques se déroulaient dans des quartiers périphériques d’une ville déjà atteinte par l’épidémie Ebola, une grève générale a paralysé les activités durant 5 jours et les évêques ont exprimé leur indignation. Cette violence représente un autre élément de l’équation : l’existence d’une centaine de groupes armés, la composition hétérogène de l’armée congolaise où certaines unités sont dirigées par des officiers issus des diverses rébellions et demeurés fidèles à Kabila est, par elle-même, un facteur de risque important. C’est là que l’aspect diplomatique intervient : lorsqu’il est interrogé sur sa politique congolaise, le ministre Didier Reynders assure qu’il tente de prévenir le risque de guerre.
Tous deux membres non permanents du Conseil de sécurité, la Belgique et l’Afrique du Sud seront donc aux manettes dans les temps à venir et à New York, Charles Michel a parlé de « désescalade »…
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