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Malgré une entente de façade, les intérêts divergent fortement entre Moscou, Téhéran et Ankara. De quoi prolonger le conflit
Le propre du piège syrien est de confronter les pays réputés "vainqueurs" à un problème aussi complexe que celui qui se posait aux nations occidentales qui avaient refusé de s'engager dans le conflit. Pour preuve, la dernière rencontre des trois coalisés de circonstance surgis de ce champ de décombres - Russie, Iran, Turquie - a encore souligné les difficultés et les divergences existant entre les "curateurs" de la tragédie syrienne.
Trump a bien compliqué la donne
S'il est en effet flagrant que le retrait des forces spéciales américaines, unilatéralement décrété par Donald Trump, laisse les Kurdes livrés à eux-mêmes, il est tout aussi évident que les intérêts et les appétits de Moscou, Téhéran et Ankara révèlent des calculs contradictoires, que le président américain a ravivé par la soudaineté de sa décision. C'est donc à la recherche d'un équilibre urgent entre les trois belligérants que Vladimir Poutine s'est personnellement attaché en cultivant un rôle de composition de médiateur-facilitateur, sans succès ce jour.
La semaine dernière à Sotchi, à l'occasion de la 4ème édition du sommet tripartite de la plateforme d'Astana, la victoire militaire n'a pas été transformée en succès politique : on peut s'associer sur le terrain, puis ne plus s'entendre autour d'une table. Du côté de Trump, en tout cas, on peut se vanter d'avoir bien obscurci la donne : "Nous ne savons pas ce qui va arriver", a laissé tomber avec scepticisme Recep Tayyip Erdogan, qui sait pourtant parfaitement ce qu'il veut.
La Turquie cherche avant tout à instaurer une zone tampon dans le nord de la Syrie, tout au long de sa frontière, afin d'en chasser les combattants kurdes des FDS (Forces Démocratiques Syriennes, alliance de groupes armés kurdes majoritaires et de supplétifs arabes). Tandis que Moscou, ainsi que Téhéran, considèrent que cette zone, une fois les Kurdes chassés, doit revenir aux troupes régulières de Bachar Al Assad.
Dans le premier cas, les Kurdes seraient aux mains des Turcs, avec tout ce que cela suppose, notamment le repeuplement de cette région par une partie des 3,9 millions de réfugiés syriens installés en Turquie ; dans le second, les FDS n'auraient pas d'autre choix que de remettre leurs conquêtes (si chèrement acquises contre Daech) aux généraux d'Assad et d'abandonner toute idée d'émancipation pour sauver leur peau.
Dépeçage de la Syrie continue
Le bras de fer se complexifie quand on sait que les Russes sont pressés de voir les Turcs attaquer la poche d'Idlib, au nord-ouest de la Syrie, le long du sandjak d'Alexandrette (Hatay, en turc), afin de liquider les djihadistes de tendance Al-Qaïda qui y ont pris racine et qui y sont devenus totalement dominants au détriment d'une population civile de 3 millions d'âmes, autant dire des otages. Il y aurait ainsi 60 000 hommes très aguerris dans le réduit d'Idlib, appartenant à différentes factions, bien entendu rivales entre elles (l'une d'elle étant même pro-turque).
Tout autour de cette véritable mosaïque d'islamistes armés jusqu'aux dents, l'armée turque a installé une dizaine de postes d'observation, très efficaces, pour circonscrire la zone. Mais c'est là une position d'attente pour Erdogan, qui privilégie d'abord la possibilité de lancer une offensive décisive contre les Kurdes à Manbij, plus à l'est, d'où les Américains sont appelés à se retirer.
Bref, l'abcès d'Idlib, qu'Assad et les Russes veulent crever sans plus tarder, permet à Erdogan de négocier un morceau encore plus gros, cette fois contre les Kurdes, qui l'obsèdent plus que les islamistes. Car le grand dessein du président turc est d'éradiquer définitivement les FDS, et d'écraser tout espoir d'autonomie kurde, sur une étendue qui va des berges de l'Euphrate à la frontière irakienne.
Idlib et les djihadistes pour les Russes, Assad et les Iraniens ; Manbij et les Kurdes pour les Turcs... le dépeçage de la Syrie continue.
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Les présidents russe Vladimir Poutine, iranien Hassan Rohani et turc Recep Tayyip Erdogan au sommet tripartite à Téhéran, le 7 septembre 2018 (© AFP)