Politique
Dans son traditionnel discours sur l’état de la nation ce lundi, le président congolais a distribué bons et mauvais points. Félix Tshisekedi a notamment demandé à son gouvernement d’accélérer les réformes. Une mise en garde qui place l’exécutif sur un siège éjectable.
C’est d’abord sur la forme que le discours devant le Congrès de Félix Tshisekedi a été remarqué. L’utilisation pour la première fois d’un prompteur a étonné plus d’un téléspectateur. « Un discours sans papiers ! » se sont exclamés plusieurs Congolais sur les réseaux sociaux, avant d’être repris par certains de leurs compatriotes habitués de ces écrans transparents qui permettent de lire un texte tout en regardant la caméra. Sur le fond, le président congolais a dressé un bilan plutôt contrasté de l’année écoulée.
Un état de siège et la présence ougandaise assumés
L’insécurité à l’Est reste une des priorités de Félix Tshisekedi. Et même si l’état de siège, décrété depuis le mois de mai, peine à donner des résultats, le chef de l’Etat a estimé qu’il a fait « bouger les lignes » et a permis à l’armée « de reprendre des bastions jadis occupés par l’ennemi ». Les chiffres restent tout de même cruels sur le bilan de l’état de siège : 1.200 civils ont été tués à l’Est du Congo depuis son instauration. Le président a évoqué pour la première fois la présence de l’armée ougandaise sur le sol congolais pour traquer les rebelles ADF, qui avait été perçu par l’opposition comme un aveu d’échec de l’état de siège. Félix Tshisekedi a assumé sa décision de « mutualiser » les efforts de guerre avec l’Ouganda, que le chef de l’Etat promet « de limiter au temps strictement nécessaire à ces opérations ».
IGF et Cour des comptes à l’honneur
Concernant la lutte contre la corruption, Félix Tshisekedi a rendu hommage à l’Inspection générale des finances (IGF), le bras armé de la présidence pour traquer les détournements de fonds et la mauvaise gouvernance. Pour améliorer la lutte contre l’impunité, le président souhaite que le Conseil supérieur de la magistrature « sanctionne le comportement des magistrats qui ternissent l’image de l’institution ». La Cour des comptes sera également rendu opérationnelle rapidement, selon Félix Tshisekedi, qui espère que « la plus haute instance de contrôle des finances publiques joue pleinement son rôle de patrouilleur financier en chef, avec l’appui de l’Inspection générale des finances ».
Le retour de la RDC sur la scène internationale
Le respect du calendrier électoral constitue également une préoccupation importante de Félix Tshisekedi à l’approche du scrutin de 2023. Le président a, là encore, assumé la désignation contestée du président de la CENI, Denis Kadima, « après consultation des Confessions religieuses et validation par l’Assemblée nationale ». Il a surtout a appelé « les acteurs politiques qui traînent encore les pieds, à désigner rapidement leurs représentants respectifs » au bureau de la CENI. Et de lancer une pique (et ce ne sera pas la seule) au gouvernement pour « mobiliser et disponibiliser les moyens financiers conséquents pour permettre à la CENI de respecter les délais d’organisation de ces élections ». Félix Tshisekedi s’est ensuite félicité du retour de la RDC sur la scène internationale. « La réintégration de notre pays dans le concert des nations est ainsi devenue une réalité ». Et de saluer les nouveaux pays qui veulent accréditer un ambassadeur à Kinshasa, comme l’Australie ou l’Indonésie.
4,5 milliards de dollars d’engagements financiers
Satisfecit enfin sur le plan économique avec le retour du Fonds monétaire international (FMI) à Kinshasa pour reprendre la coopération et financer les réformes. Félix Tshisekedi a décroché, dans un premier temps, la somme de 732 millions de dollars pour relever le niveau des réserves de la Banque centrale. Le FMI a également accordé un prêt triennal de 1,5 milliards de dollars, « ce qui monte pour l’exercice 2021, des engagements multilatéraux de l’ordre de 4,5 milliards de dollars américains ». Des grands projets de construction ont enfin été annoncés par le chef de l’Etat, comme le très attendu port en eau profonde de Banana, situé à Moanda dans la province du Kongo Central. Ou encore la réfection des routes reliants la RDC à la Zambie et l’Ouganda. Mais aussi, celles de la province du Sud-Kivu au Nord-Kivu, et du Nord-Kivu à la Tshopo en passant par l’Ituri.
Eau, électricité… des dysfonctionnements « inacceptables »
Côté pile le bilan présidentiel est présenté sous son meilleur jour, mais côté face, celui du gouvernement et des institutions étatiques est bien moins reluisant. Le président Tshisekedi a en effet reconnu que « beaucoup de ménages peinent à nouer les deux bouts du mois et n’ont pas accès aux services de base tels que l’eau, l’électricité, les soins de santé, ou les transports ». Et de s’étonner que « les centrales de Busanga dans le Lualaba, et de Mwadingusha dans le Haut Katanga, sont complètement achevées, mais toujours pas en activité ». Le président dénonce également la situation de Kisangani, « qui est restée 4 mois dans l’obscurité alors que ce désagrément aurait pu être évité avec une meilleure gestion de la centrale de la Tshopo ». Idem pour la distribution erratique de l’eau dans la capitale Kinshasa, dont les dysfonctionnements sont « inacceptables » selon Félix Tshisekedi.
Les « Warriors » doivent « accélérer »
Bien conscient que les promesses d’améliorer le quotidien des Congolais se font toujours attendre, le chef de l’Etat met la pression sur le gouvernement, censé être composé de « Warriors » comme les ministres se sont eux-mêmes nommés. Félix Tshisekedi demande à l’exécutif « d’accélérer la mise en oeuvre de projets à impacts rapides et visibles ». Une manière de prévenir l’exécutif que pendant la campagne présidentielle de 2023, il devra présenter un bilan honorable à la population s’il souhaite pouvoir briguer un second mandat. Coup de pied dans la fourmilière également des différentes entreprises d’Etat, Regideso, SNEL, qui « souffrent d’un manque de coordination et d’une faiblesse de pilotage ».
Un fusible prêt à sauter !
Le chef de l’Etat a donc distribué pendant plus d’une heure vingt bons points et mauvais points. Les bons points allant à son action impulsée à la tête du pays, et les mauvais au gouvernement et aux institutions qui ne vont pas assez vite pour mettre en place le changement. Le président s’est notamment bien gardé d’évoquer le sujet qui fâche au Congo : la fameuse taxe téléphonique RAM, dont personne ne sait, même au sein la Commission économique de l’Assemblée nationale, combien elle rapporte, ni où va l’argent. De nombreux parlementaires sont vent debout contre cette taxe qu’ils jugent infondée et injuste. Le gouvernement peine toujours à justifier sa mise en place et la fronde commence à gronder. Mais dans l’exercice très contrôlé du discours présidentiel face au parlement, Félix Tshisekedi a décidé d’endosser le costume de candidat à sa réélection plutôt que celui de président. Et si les choses ne vont pas assez vite, il y a un fusible très facile à faire sauter… le gouvernement, dont les ministres et le premier d’entre-eux sont déjà sur un siège éjectable.
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