Société
Le 08 mars est la « Journée internationale des droits de la femme ». Une des préoccupations fondamentales relative à cette dernière est sa participation dans le marché du travail. Dans une chronique précédente, les raisons expliquant l’inégalité du genre dans ce marché notamment ont été évoquées. La participation de celle-ci dans ce marché n’est pas seulement une question morale, mais également économique.
Avant d’aborder le gain économique, rappelons d’abord rapidement quelques chiffres sur le marché du travail. Le taux de participation à la population active est de 63 % pour les femmes de 15 à 64 ans contre 69 % pour les hommes de la même tranche d’âge selon l’OIT en 2021. L’estimation nationale du taux d’emploi des femmes de 15 ans et plus est de 58,9 % en 2020 contre 64,9 %. En outre, selon les données de l’Enquête EGI-ODD de 2020, le taux de salarisation des femmes est de moins de 10 % contre 20.5 % pour les hommes. De plus, 76 % des femmes employées touchent un salaire inférieur au SMIG contre seulement 58,6 pour les hommes.
Or, selon l'indice de capital humain de la Banque mondiale, la note de la RDC s'établit à 0,37, au-dessous de la moyenne des pays d’Afrique subsaharienne (0,40). Cela signifie qu'un enfant congolais né aujourd'hui ne peut espérer réaliser que 37 % de son potentiel, par rapport à ce qui aurait été possible s'il avait bénéficié d'une scolarité complète et de qualité, et de conditions de santé optimales. Les hommes et les femmes présentent a priori le même niveau de productivité selon le calcul de la Banque mondiale. Les congolaises ont quasiment les mêmes chances que leurs homologues masculins de réaliser leur capital humain.
Cependant, lorsqu’on corrige cet indice de l’utilisation de base de tous les travailleurs potentiels, le potentiel de la productivité de l’homme tombe à 24,23 % contre 22,05 % pour la femme. Dans un scénario d’une meilleure allocation du capital humain, le potentiel estimé pour la femme serait de 20,22 %, soit 0,35 point de pourcentage de moins par rapport aux hommes. Pour les autres travailleurs, elle suppose que tous les travailleurs potentiels, qu’ils soient actuellement employés, inactifs ou au chômage, occupent des emplois informels inférieurs aux normes, n’utilisant que le niveau minimum de leur capital humain.
Ces différentiels de productivité ont des effets économiques. Un rapport de 2015 du McKinsey Global Institute a exploré le potentiel économique disponible si l'écart mondial entre les sexes était réduit. J’utilise cette méthodologie pour l’appliquer à la RDC. Dans un scénario optimal dans lequel la RDC atteint les performances du pays de leur région sub-saharienne qui a fait le plus de progrès vers l'égalité des sexes, 11 milliards de dollars par an pourraient être ajoutés au PIB en 2033. Cela représenterait environ 72,7 milliards de dollars de PIB. Dans un scénario de plein potentiel dans lequel les femmes égalent la participation des hommes à la population active, leur composition sectorielle et leur combinaison d'emplois à temps plein, l'opportunité de PIB supplémentaire pourrait être de 20,7 de dollars, soit 23,73 % supplémentaires du PIB annuel en 2033 – l’équivalent de 79,7 milliards des dollars en 2030.
Quant aux effets à long-terme du PIB par habitant résultant de la réduction de l’écart d’emploi entre les sexes dans la participation au marché du travail, le niveau de vie moyen par habitant à long terme serait entre 4-11 % plus élevé si tous les écarts d’emploi entre les sexes étaient comblés. Cette ampleur relativement faible s’explique probablement parce que les femmes sont trop pauvres pour ne pas travailler. En plus, le taux d’emploi n’est pas si différent entre les hommes et les femmes en RDC.
Alors que l’on célèbre aujourd’hui cette journée, il est important de ne pas perdre de vue que l’économie congolaise est amputée d’un des facteurs de production, en laissant (par moment) de côté la femme. Et lorsque celle-ci est dans le marché du travail, on constate une différence de participation qui a des coûts économiques non négligeables. Le prochain gouvernement devra regarder avec attention la question du genre. On espère.
*Oasis KodilaTedika est un économiste et auteur récemment du livre Financement du développement en RDC : diagnostic, opportunités et perspectives.
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