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Infos congo - Actualités Congo - Premier-BET - 02 mai 2024
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Société

Les "Zaïrois" expulsés, l'économie Brazzavilloise tourne au ralenti !

2014-05-14
14.05.2014 , Kinshasa
Société / Economie / Diaspora
2014-05-14
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L'opération lancée contre les clandestins devait résoudre certains problèmes, elle en a créé d'autres bien plus coriaces.

"On ne trouve plus de bière Tembo à Brazza. Elle ne peut plus traverser le fleuve Congo, car elle n'a pas de papier", plaisante François, un habitant de Brazzaville, la capitale du Congo. Allusion ironique à l'opération Mbata ya Bakolo, traduction en lingala, l'une des langues les plus usitées ici, de "la gifle des aînés". Rappel des faits. Lancée le 4 avril dernier par la police, cette opération vise, selon les autorités du pays, à lutter contre l'immigration clandestine et l'insécurité.

Celle-ci est liée notamment à la présence de kuluna, des gangs de délinquants originaires de Kinshasa qui s'étaient repliés à Brazzaville après avoir été pourchassés par la police de la capitale de la Rd Congo, juste de l'autre côté du fleuve Congo. Résultat : le départ forcé ou volontaire de près de 80 000 "Zaïrois", comme on les appelle encore à Brazzaville.

Les marchandises commencent à manquer

Le problème, c'est que Brazzaville commence à sentir durement les retombées sociales et économiques. Car la Tembo, la célèbre bière brune fabriquée par les Brasseries Simba, à Lubumbashi, le chef-lieu de la province du Katanga en Rd Congo, ou même la Skol, une bière produite à Kinshasa, ne sont pas les seules marchandises importées du grand voisin à devenir plus rares sur les marchés et dans les échoppes de Brazzaville. "Certes, la ville ne va pas mourir de faim à la suite de la baisse des échanges commerciaux entre les deux capitales. Elle est ravitaillée en partie par les départements du Pool et des Plateaux et même par le Cameroun", insiste Annie. Néanmoins, "Brazza", pour les intimes, dépend aussi de Kinshasa pour des denrées de base comme le sucre en poudre, les congelés, les biscuits. Sans compter le savon, les détergents, les ustensiles en plastique, le papier hygiénique ou les aliments pour bétail et autres produits. Conséquence de ces ruptures d'approvisionnement et de la raréfaction de ces marchandises sur le marché : "Les prix ont flambé", se désole Marie, une couturière.

Il faut dire que, traditionnellement, le solde des échanges commerciaux entre les deux villes est au bénéfice de Kinshasa. "Pour trois raisons", explique Alain, un jeune Brazzavillois. "D'abord, l'offre en produits est plus abondante en Rd Congo. Ensuite, les Kinois sont plus commerçants que nous. Enfin, le pouvoir d'achat est plus élevé chez nous", poursuit-il. "Néanmoins, Brazzaville exportait aussi vers Kinshasa de la farine de manioc, des feuilles de koko et des produits manufacturés, comme des vêtements, via une foule de petits revendeurs kinois", ajoute-t-il. Aujourd'hui, ces produits étant moins demandés, les commerçants, en particulier les Ouest-Africains implantés dans les avenues de France et de la Paix à Brazzaville, se lamentent. "Les Kinois traversaient le fleuve pour nous acheter en gros des ballots de friperie et de jeans ainsi que des pagnes importés de Chine qu'ils revendaient à Kinshasa. Aujourd'hui, on ne vend plus et on perd de l'argent", se plaint Doucouré, un Malien. Tout porte à croire qu'au passage plusieurs millions de francs CFA sont bloqués à Kinshasa faute de pouvoir être reversés ou échangés à Brazzaville.

L'impact s'étend jusqu'au transport, aux bars, aux logements...

Les commerçants ne sont pas les seuls à souffrir du départ des Rd-congolais. D'autres secteurs d'activité sont également touchés. À double titre, car s'ils sont perçus comme des étrangers, les "Zaïrois" sont des agents économiques à part entière, insérés dans un système économique global. Ce sont à la fois des producteurs de biens et de services mais aussi des consommateurs. Ce que beaucoup oublient. Du coup, leur absence pèse autant sur le marché du travail que sur celui de la consommation. "C'est de l'offre et de la demande en moins pour le Congo", analyse Jean-Jacques Samba, secrétaire général d'Unicongo, le syndicat patronal congolais.

"Il y a moins de monde aux arrêts de bus et d'enfants dans les écoles privées. Ce sont des revenus en moins pour tout le monde", assure Alain. Dans les bars et les boîtes de nuit, la clientèle est également plus rare et la recette en chute. Avenue Maya-Maya à Moungali, un des fiefs des "Zaïrois", avec les communes de Talangai et de Bacongo, les bars sont moins remplis et la musique beaucoup moins trépidante depuis quelques semaines. "On vend moins et on ferme plus tôt", confirme Annie, une employée de bar.

Le manque à gagner se fait également sentir chez les bailleurs, propriétaires de maisons et de chambres qui ont perdu une partie de leurs locataires. Il n'est pas rare de voir désormais des affichettes indiquant "chambres à louer", placardées le long des grands axes routiers des quartiers populaires de Moungali ou de Talangaï. Pour certains bailleurs, qui sont des retraités, la situation devient critique, car ces derniers vivent souvent de la location de chambres.

Les entreprises souffrent du manque de main-d'oeuvre

Sur le front du travail, les retombées sont tout aussi néfastes. Le manque de main-d'oeuvre a entraîné une augmentation des salaires. "Si l'économie informelle est touchée, compte tenu de la place qu'y occupaient les Kinois, même les grandes entreprises sont affectées, car elles sous-traitent à des PME qui s'adossaient sur la main-d'oeuvre d'origine kinoise. Ainsi, des entreprises comme les Brasseries vont avoir du mal à écouler leurs productions, car beaucoup de manœuvres et de chauffeurs étaient des Kinois", insiste Samba. De même, bien des chantiers de BTP, formels ou informels, peinent à trouver des ouvriers qualifiés et des "manoeuvres" : maçons, électriciens, transporteurs, manutentionnaires, charpentiers, ferrailleurs, etc. Il s'agit là d'emplois boudés par les Brazzavillois mais que les Zaïrois acceptaient d'occuper à moindre coût.

C'est d'ailleurs à la faveur des chantiers de la municipalisation accélérée lancés en 2007 et des grands travaux engagés dans le pays que ces derniers étaient d'ailleurs venus s'installer en grand nombre à Brazzaville dans l'espoir de vendre leur savoir-faire, mieux rémunéré ici qu'à Kinshasa. "Aujourd'hui, quand les employeurs arrivent à trouver du personnel, il faut le payer plus cher", souligne cet entrepreneur. À Kintélé, ville située à une quarantaine de kilomètres au nord de Brazzaville, sur la RN2, une entreprise qui intervient dans la construction du grand stade olympique a dû geler en partie son chantier, limitant ce dernier à des activités mineures, par manque d'ouvriers.

Le service aux maisons connaît aussi une pénurie

De même, le personnel de maison, par exemple les femmes de ménage et les gardiens, se fait plus rare. Dans les quartiers, la vie quotidienne est également touchée par le départ des "frères d'en face". Force est de constater en effet que bien des petits métiers - maçonnerie, électricité, cordonnerie, menuiserie, transport, garage, salon de coiffure et autres - qui rendaient des services indispensables au fonctionnement du quotidien étaient assurés par des ressortissants de RD Congo. Du coup, leur départ a créé un vide, comme l'a constaté Marie. "Je voulais acheter un meuble en rotin, mais l'artisan qui les fabriquait est retourné à Kinshasa."

Sur les deux grands marchés de Brazzaville que sont Total et Poto-Poto, l'absence des "Zaïrois" se fait sentir. "Les femmes étaient des revendeuses et les hommes faisaient des travaux de manutention, comme le chargement et le déchargement des camions ou le transport des marchandises avec des pousse-pousse", informe Scholastique, une commerçante de Bacongo. Même à la gare centrale du chemin de fer Congo Océan de Brazzaville, il est difficile de trouver du personnel pour décharger les paquets de ciment venant de Loutété ou de l'étranger.

La collecte des ordures et la distribution de l'eau sont aussi affectées

Autres services affectés : la collecte des ordures ménagères, avec les conséquences sanitaires qu'on imagine, et la distribution de l'eau dans certains quartiers, comme le plateau des Quinze Ans à Moungali. Il faut dire que la plupart des petits éboueurs qui ramassaient chaque jour les ordures ménagères dans les quartiers populaires de la ville étaient de jeunes "Zaïrois". Des services qu'ils monnayaient pour quelques francs CFA. Certains ont dû abandonner précipitamment leur activité, si l'on en juge par les charrettes pleines d'ordures, abandonnées ici et là, le long de la voirie. Depuis leur départ, des tas d'ordures s'accumulent devant les parcelles. Dans certaines communes comme Bacongo, les habitants tentent de s'organiser pour collecter les détritus. Ailleurs, la situation devient critique. La distribution de l'eau, assurée en partie par les "Zaïrois", qui allaient remplir les bidons à des points de forage et les apporter à domicile, commence également à faire défaut. Conséquence, plus d'une secrétaire ou employée, mère de famille, arrive aujourd'hui en retard au travail pour avoir perdu du temps à faire le tour du quartier à la recherche de quelques litres d'eau nécessaires au fonctionnement du ménage.

Paradoxe des paradoxes : bien des Brazzavillois souhaitent le retour de leurs frères du pays voisin. "A condition bien sûr que ces derniers soient en règle, et que les kuluna, dont les actes violents ont causé beaucoup de dégâts ici, ne remettent plus les pieds à Brazzaville", insistent-ils. Reste que même s'ils souhaitent retraverser le fleuve Congo, les Congolais de Kinshasa vont y réfléchir à deux fois. Nul doute que, de ce côté aussi, la leçon des tracas économiques qui ont suivi ces expulsions devrait favoriser un autre regard sur ces "Zaïrois" une fois régularisés. Leur poids économique et social a pu être mesuré à l'aune des problèmes posés à Brazzaville au lendemain de l'opération Mbata ya Bakolo.


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