Afrique
Accusations de fraudes, violences, implication de l’armée… Alors que les Zimbabwéens attendent les résultats de la présidentielle du 30 juillet dernier, tous les ingrédients semblent désormais réunis pour un remake de la tragédie électorale de 2008.
De la violence dans l’air au Zimbabwe. Et ce n’est pas du vent vu le climat qui a prévalu ce mercredi 1er août au Zimbabwe où trois personnes ont trouvé la mort suite aux heurts entre militants du Mouvement démocratique pour le changement (MDC, opposition) la force publique qui en dehors des gaz lacrymogènes, a tiré à balles réelles pour contenir ces manifestations organisées par le MDC.
Voulant se rendre en masse au siège de la Commission électorale du Zimbabwe (ZEC) pour dénoncer le « trucage en cours des résultats » de la présidentielle, des membres du MDC ont été bloqués par des policiers anti-émeutes appuyés par des éléments de l’armée pour disperser la foule.
À qui la faute ?
Mais, si tous les acteurs politiques semblent d’accord sur le bilan, qui de la Majorité, de la Force publique et du gouvernement doit porter la responsabilité de ces premières violences électorales de l'ère post Mugabe ? En tout cas, pour Mnangagwa, pas question de chercher le responsable dans la planète Mars. C’est le MDC qui est à l’origine de ces violences.
« Les dirigeants du MDC devraient être tenus responsables des violences qui ont secoué le quartier général de la ZEC et de toute perte humaine et matérielle qui aurait pu se produire », a déclaré le chef de l‘État zimbabwéen lors d’une conférence animée dans la soirée.
Mais que dira Nelson Chamisa en réponse à ces accusations d’Emmerson Mnangagwa ? Difficile de le savoir. Une chose est sûre : le débat sur la responsabilité de ces violences ne fait que commencer. Un débat qui pourrait plonger le Zimbabwe dans une grave crise électorale marquée par des violences meurtrières. Comme il y a dix ans.
Le 27 juin 2008 se déroule le second tour de l‘élection présidentielle opposant le président sortant Robert Mugabe à l’opposant Morgan Tsvangirai vainqueur au premier tour avec 47,9 % contre 43,2 % de suffrages pour Mugabe. C’est aussi le MDC qui remporta pour la première fois depuis l’indépendance en 1980, les législatives avec 109 sièges contre 97 pour la ZANU-PF (sur un total de 210).
Malheureusement, Mugabe est seul en lice au deuxième tour de la présidentielle suite au retrait de Morgan Tsvangirai. « Nous, le Mouvement pour le changement démocratique [MDC], nous ne pouvons pas demander à nos militants de voter le 27 juin en sachant que voter pourrait leur coûter leur vie. Nous avons décidé que nous ne participerons plus à cette simulation de processus électoral, violente et illégitime. Nous ne jouerons pas le jeu de Mugabe », déclara le chef de file de l’opposition une semaine avant le deuxième tour.
Que s‘était-il passé pour que Tsvangirai jetât l‘éponge ? Peut-être avait-il craint de perdre beaucoup de militants, car selon des ONG, on dénombra des centaines de militants du MDC qui périrent dans des violences électorales. Parmi ces victimes, Emmanuel Chiroto, maire MDC d’Harare enlevé avec sa femme et son fils de 4 ans.
Les mêmes causes engendreront-elles les mêmes effets ?
Mais bien qu’ayant joué un important rôle en tant que responsable de la sécurité à l‘époque, d’après des ONG, Mnangagwa entend mettre un point d’honneur à rompre définitivement avec la gouvernance électorale de son prédécesseur. Le « Crocodile » qui, contrairement à Mugabe, a invité les observateurs occidentaux, entend s’incliner devant le verdict des urnes.
Toutefois, les violences de 1er juillet semblent avoir un relent d’intimidation exercée en utilisant la Force publique, l’une des pièces maîtresses de l’appareil institutionnel. Une stratégie que connaît bien Mnangagwa pour avoir été responsable de la sécurité à l‘époque des faits. Si ce n’est pas encore le cas, le gouvernement a déjà promis d’engager des poursuites judiciaires contre quiconque publierait des résultats « non certifiés » par la ZEC. Une ZEC qui, à en croire Chamisa serait en train de manipuler les résultats de la présidentielle au profit du président sortant.
Et comme dans plusieurs pays d’Afrique, la gouvernance électorale risque encore d’empoisonner le climat politique au Zimbabwe.
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