Insolite
Dans les rues sales et grouillantes de Ngaba et Kalamu, deux quartiers populaires du sud de la capitale de la République démocratique du Congo, la vie reprend. Les boutiques ouvertes après les émeutes meurtrières de lundi à mercredi sont toutes tenues par des « bana mboka », des enfants du pays.
Fenêtres brisées, portes défoncées, les commerces chinois, de la petite échoppe au magasin général, sont dévastés. Les pilleurs ont tout pris : ne restent plus que des murs vides et un sol couvert de débris. Les Chinois, eux, sont invisibles ce matin.
Ce magasin congolais à côté d'un autre dévalisé peut rouvrir et servir sa clientèle. Avisé, son propriétaire avait écrit en gros caractères à la craie blanche sur ses murs « ya bino moko », expression en lingala que l'on pourrait traduire par « cela t'appartient aussi ».
« Ici chez moi, j'ai une imprimerie ainsi qu'un magasin de pièces de rechange ; rien n'a été touché sauf le magasin des Chinois », dit un homme d'affaires de 37 ans, propriétaire de locaux commerciaux.
Les violences qui ont frappé Kinshasa ont commencé par des manifestations de l'opposition destinées à faire obstacle à un projet de révision de la loi électorale ouvrant la possibilité d'un report de la présidentielle censée avoir lieu fin 2016. Ce qui permettrait au président Joseph Kabila, au pouvoir depuis 2001, de se maintenir au-delà de la fin de son mandat, alors que la Constitution lui interdit de se représenter.
Elles ont vite dégénéré en émeutes et pillages, dont les boutiquiers chinois ont été parmi les premières victimes. Selon le gouvernement, une cinquantaine d'opérateurs économiques chinois ont ainsi été ciblés.
« Lin », « Yang », « La Chinoise », ou « Heng Fa » sont autant d'enseignes familières dans les quartiers populaires. Elles s'étalent en caractères latins au-dessus de quelques idéogrammes.
Ils exagèrent
Difficile de dire combien la capitale compte de commerçants chinois. A l'ambassade de Chine, on indique que 4.000 à 5.000 ressortissants chinois vivent en RDC, mais on reconnaît que leur nombre est sans doute bien plus élevé. Beaucoup vivent au Katanga, dans le sud-est, travaillant pour les nombreuses entreprises minières chinoises qui y sont implantées.
A Kinshasa, outre les détaillants, on en voit beaucoup travaillant comme ouvriers à la construction de routes ou de chantiers tenus par des groupes chinois pour la réalisation d'infrastructures. Elles ont été promises en échange de concessions minières et de prêts à l’État congolais dans le cadre d'un gigantesque contrat signé par Pékin et Kinshasa en 2007 et 2008, et dénoncé comme léonin par les Occidentaux.
Une chose est sûre : à l'inverse des expatriés blancs qui habitent presque exclusivement les quartiers huppés du nord de cette mégapole de près de 10 millions d'habitants, les Chinois vivent au contact du peuple dont ils partagent les difficiles conditions.
Au contact mais en marge, logeant bien souvent en communauté dans des habitations surpeuplées et conservant leurs habitudes, ce qui suscite souvent un étonnement mi-amusé mi-agacé auprès des Kinois.
Pour certains observateurs, les Chinois ont été attaqués par des émeutiers hostiles à M. Kabila en tant que « symbole » du pouvoir, du fait des bonnes relations entre Pékin et Kinshasa.
A Ngaba et Kalumu, on avance d'autres explications.
« Les Chinois [...] cassent les prix », ils « exagèrent », déclare un homme de 24 ans. « Ils vendent tout. Nos affaires ne marchent plus à cause d'eux », ajoute un vendeur des cartes téléphoniques prépayées, espérant que les pillages leur serviront de « leçon ».
Mais « ce n'est pas une raison pour [...] piller » leurs biens, affirme le bourgmestre de Kalamu, Jean-Claude Kadima.
Les « Congolais sont simplement jaloux » des Chinois parce qu'ils vendent leurs marchandises « à bon prix », estime une vendeuse de pain assise sous un parapluie. « C'est malheureux », ajoute-t-elle en secouant la tête.
Interrogée par l'AFP, une diplomate chinoise souhaitant rester anonyme assure que les ressortissants de son pays n'ont reçu aucune consigne de sécurité particulière et minimise l'ampleur des événements. Pour elle, les pillages sont des « cas isolés », cela n'a rien avoir avec un quelconque « complot contre les Chinois ».
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