Le batteur Meridjo est mort

Jean-Marie Belobi Ng’Ekerme dit Meridjo est mort jeudi 27 août à Liège, en Belgique, à l’âge de 67 ans, après une longue maladie. Créateur du rythme « Cavacha », il est parmi les premiers artistes qui ont intégré le groupe musical populaire Zaïko Langa Langa, lors de sa création par Vital Moanda-di Veta (DV Moanda) en 1969.

La mort vient de frapper à nouveau à la porte de la grande famille Langa Langa. Meridjo, l’ancien batteur de l’orchestre Zaïko Langa Langa, est mort. L’annonce de sa disparition a énormément affecté les mélomanes de la bonne musique congolaise.

A l’instar de Seskain Molenga (un ancien des groupes Empire Bakuba et Afrisa international), Meridjo peut être considéré comme l’artiste qui a révolutionné la musique rythmique congolaise actuelle. La manière dont on joue de la batterie, aujourd’hui, en maniant harmoniquement la caisse claire, c’est lui. Meridjo crée ainsi le rythme « Cavacha » grâce à un éventail de possibilités qu’offre cet instrument de musique. Le « Sébène » (la partie dansante que l’on retrouve dans la musique congolaise) voit le jour.

Le rythme « Cavacha », cette cadence particulière à la batterie, a façonné les contours de la musique de l’orchestre Zaïko Langa Langa et a influencé de nombreux batteurs, communément appelés drummeurs en RDC, qui ont repris ce rythme envoûtant.

Pour l’histoire, en 1971, Zaïko Langa Langa effectuait son premier voyage à l’étranger, plus précisément au Congo-Brazzaville. Dans le train qui les amenait à Pointe Noire, les musiciens chantaient et dansaient au rythme des bruits ou les cliquetis des roues motrices du train. Ils demandent à Meridjo s’il ne peut pas reproduire ce rythme sur une batterie. Ce dernier s’y met, écoute les cris d’oiseaux, les bruits de moteur du train et il finira par créer un rythme.  Le nom « Machine ya Kauka » (le train de Kauka) est né. « Kauka », allusion au quartier des matelots à Kinshasa, dans la commune de Kalamu, où l’artiste a passé sa jeunesse. Les musiciens travaillent sur ce rythme pour harmoniser l’ensemble. Le rythme « Cavacha » est lancé et se répand en Afrique et aux Antilles. Le nom de Meridjo est ainsi entré dans l’histoire de la musique congolaise moderne.

L'artiste figure parmi les meilleurs auteurs-compositeurs de l’orchestre Zaïko Langa Langa. Machine à tubes, il a écrit de nombreuses chansons à succès comme « Sangela », « Nyongo ekeseni », « Kwiti-Kwiti », « Ben Betito », « 77x7 », « Bolingo aveugle », « Matondo », « Zizita » … Ces belles créations musicales qui ont fait parler de lui.

Cependant, un malheur lui tombe dessus en 1974. Meridjo est arrêté et enfermé dans la prison d’Ekafela (une île en pleine forêt équatoriale) sous la deuxième République (pour une affaire d’amour, selon certaines indiscrétions). Bakunde Ilo Pablo est recruté pour le remplacer. Il est resté pendant presque 2 ans en taule, au cœur de la cuvette congolaise, en attendant les démarches entreprises par DV Moanda pour le libérer. Batteur endiablé des tam-tams, il égaye les gardiens avec qui il noue des liens d’amitié. C’est ainsi qu’il s’évade dans la nature pour se retrouver à Kinshasa.

La toile enflammée

Fidèle musicien de l’orchestre Zaïko Langa Langa pendant 28 ans (de 1971à 1999), l’apport de Meridjo dans cet ensemble musical, considéré comme la 3ème école de la musique congolaise, est inestimable. Sa disparition est une grande perte pour le monde de la musique et de la culture en général, en RDC et en Afrique.

Dès l’annonce de sa mort, les réactions se sont multipliées dans le monde, notamment dans la diaspora congolaise, les réseaux sociaux saluant la mémoire d’un batteur hors du commun : « C’est incroyable », « C’est triste », « Ce n’est pas possible », « Machine ya Kauka repose en paix », « Nous ne t’oublierons jamais », « Au revoir le père, le créateur du rythme Cavacha », « Bravo l’artiste ! » …, peut-on lire sur la toile enflammée.

Les artistes ne meurent jamais, dit-on. Jean-Marie Belobi Ng’Ekerme dit Meridjo restera à jamais vivant pour la postérité, par ses œuvres. Au revoir « Machine ya Kauka ».