La société de raffinage d'or tessinoise Argor Heraeus SA ne comparaîtra pas devant la justice. Le Ministère public de la Confédération (MPC) a classé la procédure ouverte pour soupçons de blanchiment d'argent et de complicité de crime de guerre. Des ONG s'insurgent.
Le procureur a reconnu que l'entreprise avait contribué aux exactions commises dans une zone de conflit en République démocratique du Congo (RDC). Car sans la perspective d'un commerce juteux, les pillages et trafics d'or brut ne se seraient pas produits, souligne mardi 2 juin, la Société pour les peuples menacés dans un communiqué.
En outre, Argor Heraeus SA aurait dû savoir que l'Ouganda, d'où elle importait le minerai, ne compte quasiment pas de mine d'or. La question de l'or sale de RDC était en outre abondamment traitée, notamment dans les médias, ajoute l'ONG Trial.
Le Ministère public de la Confédération constate d'ailleurs que si la société s'était renseignée sur la provenance du métal précieux, comme l'exige son règlement interne depuis août 2004, elle aurait remarqué qu'il était vraisemblablement volé. Mais justement, la justice n'a pas trouvé trace de "doutes" émis par l'entreprise sur l'origine criminelle de l'or, d'où le classement de la procédure.
Ce n'est pas parce que la firme "aurait dû savoir" qu'elle a pour autant eu l'intention de commettre un délit. Le MPC abandonne donc la charge d'assistance intentionnelle à la commission de crime de guerre. Il estime également qu'il n'y a pas eu de blanchiment d'argent.
En octobre 2013, trois ONG, dont Trial, avaient dénoncé pénalement Argor-Heraeus SA auprès du Ministère public de la Confédération. Elles soupçonnaient l'entreprise de blanchiment en raison du raffinage d'or pillé de la RDC en 2004 et 2005.
L'enquête menée par l'Association suisse contre l'impunité Trial a permis de rassembler des preuves, avait affirmé cette dernière. Argor-Heraeus SA aurait raffiné entre 2004 et 2005 près de trois tonnes d'or pillé en République démocratique du Congo (RDC) par un groupe armé, le Front nationaliste intégrationniste (FNI).