Élection de Lula au Brésil: quel programme économique pour ce nouveau mandat?

L'élection de Lula dimanche et la défaite de Jair Bolsonaro représentent un vent d'espoir pour de nombreux Brésiliens. Mais le nouveau dirigeant hérite d'un contexte économique et social tendu pour ce nouveau mandat.
 
"Le Brésil est de retour", a répété Lula à plusieurs reprises à l'issue du scrutin de dimanche qui l'a de nouveau propulsé ce dimanche à la tête du pays, après plus de dix ans d'absence. Le leader de gauche a obtenu 50,9% des voix au second tour, contre 49,1% pour le président d'extrême droite Jair Bolsonaro. Et pour ce troisième mandat, Luiz Inacio Lula da Silva devra composer avec une conjoncture économique incertaine.

Parmi les principaux défis qui attendent le nouveau chef d'Etat, figure la maîtrise de l'inflation. Au-dessus des 10% en août, son indicateur sur douze mois a reculé à 7% le mois suivant. Mais elle reste une préoccupation majeure dans le pays, notamment pour les plus pauvres.

Des réformes sociales contre l'inflation et la pauvreté

Pour faire face à ses conséquences, Lula prévoit ainsi en premier lieu de réajuster le salaire minimum à cette hausse de prix. Le volet social de son programme intègre aussi une exonération d'impôt sur le revenu pour les plus pauvres et une hausse des aides dans le cadre de la "Bolsa Familia" (Bourse familiale en français). Destiné aux populations les plus précaires, ce programme avait été développé lors de ses deux premiers mandats, en 2003 et en 2010.

Lula a par ailleurs promis de renforcer la protection sociale en revenant notamment sur la réforme du code de travail menée en 2017.

Des investissements dans les infrastructures

Intitulé "Ensemble pour le Brésil", le programme du parti travailleur prévoit aussi des investissements massifs dans les infrastructures. "Il est nécessaire de garantir la modernisation et l'expansion des infrastructures de transport, de la logistique sociale et urbaine, avec un vigoureux programme d'investissement public", peut-on lire dans le document. Pour le parti, ce plan d'investissement est essentiel pour relancer la croissance et pour réduire les coûts de production.

Mais l'investissement privé devrait être partie prenante de ce programme et sera encouragé par "crédits, des concessions, des partenariats et des garanties".

Pour permettre ces investissements, Lula devrait tenter de modifier les règles de plafonnement des dépenses publiques qui limitent leur croissance au niveau de l'inflation.

Une attractivité à restaurer

Après des années d'isolement, le dirigeant entend aussi rétablir le rayonnement international du Brésil. Il souhaite, pour ce faire, signer de nouveaux accords internationaux et ainsi redevenir attractif pour les investisseurs étrangers. Avant même la passation de pouvoir, le septuagénaire devrait donc se rendre à l'étranger afin d'envoyer un message fort.

Quant au ministre de l'économie sur lequel il s'appuiera pour mener son programme économique, Lula n'a pour le moment donné aucun nom. Il a seulement indiqué que celui qu'il choisira saura réfléchir à la fois à la responsabilité fiscale et sociale.

Une caution libérale pour rassurer les marchés?

Le nom du nouveau vice-président Geraldo Alckmin est toutefois prononcé par de nombreux experts. Libéral et conservateur de droite, il est aussi l'ancien adversaire de Lula à la présidentielle de 2006. En cas de nomination, cette figure, qui a déjà su fédérer les électeurs centristes pendant la campagne de Lula, pourrait aussi représenter une caution libérale et rassurer les marchés à l'aube de ce nouveau mandat.

Lula peut se targuer d'avoir déjà réussi à relancer l'économie brésilienne par le passé. Lors de ses premiers mandats, le premier chef d'Etat brésilien issu de la classe ouvrière avait d'abord mené une politique économique orthodoxe. Ce n'est que progressivement qu'il avait appliqué ses réformes sociales et mis en œuvre son programme de soutien à la croissance.

Résultat, non seulement le pays avait renoué avec la croissance, à plus de 5% par an à partir de 2007 mais 30 millions de Brésiliens étaient aussi sortis de la pauvreté.

Un défi qui s'annonce plus compliqué à reproduire aujourd'hui. Alors que le boom des matières premières avait participé à relancer la croissance dans les années 2000, les obstacles s'annoncent plus nombreux pour ce nouveau mandat. Au-delà de l'inflation, de l'isolement international et de la hausse des taux d'intérêt américains qui plombent l'économie brésilienne, la majorité de droite du Parlement pourrait encore venir compliquer la tâche de Lula.